Les Cèdres du Libanpar
Fulvio Roiter, 1980, Conseil N. de Tourisme au Liban
Les Cèdres au Liban sont liés à
l’histoire de ce pays. Ils la racontent aussi bien
que les cités antiques de Byblos, Tyr et
Baalbek. A l’époque fort ancienne où
la Phénicie livrait leur bois aux Pharaons,
il y avait des cèdres, extrêmement
nombreux, qui recouvraient toute la haute montagne.
C’était l’arbre religieux par excellence,
destiné à la fois au culte des dieux
et à celui des morts, dont on sait l’importance
que leur attachaient les peuples de l’Orient ancien.
Réduits maintenant à un petit nombre,
du fait de cette abusive exploitation, leur présence
auguste évoque la neige, les sources, le
pur silence des sommets où semble s’arrêter
le temps; elle évoque aussi des paysages
lunaires où s’évade le regard dans
des rêveries sidérales.
Les cèdres de la région de Bécharré,
au nord du Liban, sont les plus réputés
pour leur ascendance biblique. C’est un bouquet
d’arbres, monument classé, entouré
d’un muret protecteur. Ces patriarches méritaient
une telle attention. Un peu plus au nord, à
Ehden, on trouve un joli bois de cèdres.
Il y a également des cèdres dans la
région de Jbeil, à Jajje tout près
de Laqlouq, au milieu d’un site rocheux qui les
rend encore plus impressionnants. Mais là
où ils sont les plus nombreux, plusieurs
milliers, c’est à Hadeth al-Jebbe. Ils sont
cependant beaucoup plus jeunes que les cèdres
millénaires de Bécharré. Enfin,
au Chouf, dans la région du Barouk et de
Ain Zhalta existe une assez grande forêt de
cèdres qui, s’étageant sur des pentes,
frappent d’autant plus l’imagination.
Ces arbres se trouvaient en nombre sur les sommets,
mais aujourd’hui la plupart de ceux-ci sont des
stations de ski: dans la région de Bécharré,
dans le massif du Sannine et à Laqlouq dans
la région de Jbeil. Il y a en outre des projets
d’aménagement pour d’autres sites, notamment
sur l’Hermon dont les pentes sont remarquables.
Toutes les stations disposent de l’équipement
le plus moderne, télésièges,
remonte-pentes, téléskis et autres
installations. Ces hauts sommets, chose curieuse,
sont généralement distants d’une demi-heure
à une heure des ports de plaisance, nombreux
tout le long de la côte, et dont celui de
kaslik, non loin de Byblos, est le plus important.
Ainsi, peut-on dans la même journée,
à un court intervalle, se livrer aux joies
du ski en montagne et du ski nautique, ce qui est
unique au monde.
Dans la station des Cèdres de la région
de Bécharré, les remontées
mécaniques se trouvent sur le versant qui
mène à Qornet as-Saouda, point culminant
du Liban. Au pied du cirque où elle est située,
s’ouvre la vallée de Qannoubine qui avait
abrité tant de saints ermites. Du col de
Aïnata, à 2.600 m d’altitude, le skieur
(ou le promeneur) jouit d’une vue fantastique sur
la plaine de la Béqaa, l’Hermon, le mont
Sannine, merveilleuse vallée de la Qadisha
et, depuis les sommets sur la mer, une mer de saphir
pâle, jusqu'à la ligne d’horizon. Certains
prétendent même avoir aperçu
Chypre dans les lointains. Une extraordinaire vision
d’ensemble, on en conviendra.
En dehors des parcours des remontées mécaniques,
la randonnée à ski à une plus
haute altitude est absolument grisante. S’il faut
marcher, peiner pour l’entreprendre, on est largement
payé de ses efforts. C’est qu’à chaque
virage, on découvre un paysage extraordinaire,
de hauts plateaux de montagne couverts de dolines,
avec leurs congères et leur blanche solitude,
ce qui donne une étrange impression de proximité
et d’éloignement tout à la fois. Et
c’est une griserie totale que de se retrouver seul
dans la nature. Cela s’appelle un sport majeur,
une vraie façon de découvrir un pays.
Une autre randonnée: la traversée
des Cèdres en direction de Sir al-Dennieh,
village au nord des Cèdres, au-delà
de Tripoli. On descend – mais là aussi il
faut d’abord grimper – de 3.000 à 1400 m,
à ski en longeant des bois de genévriers.
L’enivrement dionysiaque et le plein air vous transportent.
Il est vraiment heureux qu’il y ait au Liban tant
de jours d’ensoleillement dans l’année, même
au cœur de l’hiver.
Laqlouq, au nord-est du pays, est une petite et
familiale station d’hiver, qui a été
aménagée en terrasses, en déblayant
des rochers érodes. Une très belle
région où abondent pommiers, poiriers
et cerisiers.
Bien plus importantes, les trois principales stations
du massif du Sannine : Faraya-Mzar, Faqra et Qanat-Bakish.
Ici également, il y a de belles randonnées
qui procurent un sentiment de découverte.
Mzar signifie temple, et les temples étaient
sur les cimes ainsi qu’en témoignent de nombreux
vestiges. Pourquoi ? C’est que les voyageurs, les
caravaniers de l’époque, une fois au faîte,
tenaient à rendre grâce à leurs
dieux.
Il y a dans cette région beaucoup de curiosités,
comme le pont naturel de Mzar, résidu d’érosions,
d’une bonne trentaine de mètres. Et les temples
de Faqra que Renan considérait comme le groupe
de ruines le plus spectaculaire de la montagne.
Du reste, on trouve en montagne des lieux de culte
de toutes les religions, sans doute parce que l’homme
avait et a l’impression que plus il monte, plus
il se rapproche de Dieu. De Mzar, autre vue splendide,
on embrasse tout ensemble la Béqaa, l’Hermon,
Laqlouq, les Cèdres et la côte libanaise
qui va de Byblos à Saida. C’est un des plus
beaux spectacles du Liban.
Sur le flanc ouest du Sannine, une petite station,
celle du Zaarour d’où on a une imprenable
vue du Sannine et de la fameuse Vallée des
Crânes.
Enfin l’Hermon qui ne possède encore aucun
équipement mécanique. Il faut faire
4 km à pied pour arriver au départ
du couloir qui aboutit au sommet. De ces hauteurs,
s’offre au regard, qui ne sait sur quoi s’attarder,
un des plus beaux panoramas. Sommets altiers du
Liban, cimes innocentes, prodigues de sources, montagnes
où règne l’arbre roi, le cèdre
millénaire, témoin du passé,
est impassible aux contingences de l’histoire. Si
les Libanais l’ont choisi comme emblème de
leur drapeau, c’est qu’ils voient en lui comme un
garant du futur, c’est qu’il traduit leur volonté
de durer. Le cèdre symbole de pérennité.
Avec toutes ses branches rassemblées…
- Les Cèdres du Liban:
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