Une
Hôte du temps de Béchir agressive et
gênante: Lady Esther Stanhope, Djoun
Une hôte de Marque vint habiter définitivement
le Liban en 1808. La nièce du fameux homme
d’état britannique William Pitt. Elle était
née en 1776 et avait été la
secrétaire, confidente et le bras droit de
son oncle, jusqu’à sa mort en 1806.
Ayant apprit la triste nouvelle qui la désorienta
: la mort de son frère et de son fiancé
le Général John Morre à la
bataille de Corogne gagnée par Napoléon
en Espagne, Lady Esther Stanhope décida de
venir en Orient. Elle visita Istanbul, parcourut
Egypte, la Palestine, la Syrie… et se fixa à
Djoun au Liban sud. Elle y est morte en 1839.
Esther était d’une belle allure, svelte,
imposante, autoritaire : sa couleur, sa fraîcheur,
sa grâce, son charme … étaient uniques
une belle femme à contempler… pureté
de lignes, majesté tout en elle était
poussé au sublime. Pour la décrire,
il faudrait un chapitre, en plus de ce physique
exceptionnel, il faut joindre son courage, sa pensée,
son intelligence, sa volonté : une vraie
Pitt. qui ne connaissait pas la peur, beauté
féminine inégale et courage d’un homme
hors commun.
Jeune, belle, riche, audacieuse, aimable… à
Djoun, elle avait beaucoup de préoccupations
‘orientales’ sur une colline ‘Dahr el Sitt’. La
‘Colline de la Dame’ elle construisit sa résidence
et mena une vie d’un luxe oriental des mille et
une nuits, servie par une armée de serviteurs
: plus de cinquante personnes venues de toutes parts
se plier à sa merci, un médecin personnel
et deux fois plus d’indigènes, maîtres
d’hôtel, des femmes suisses, anglaises,… étaient
ses dames de compagnie…, des libanaises druzes et
chrétiennes étaient aussi dans son
armée. ‘Fattoum et Zaïzafoun jeunes
servantes qu’elle terrorisait, son caractère
était des plus bizarres, elle avait une véritable
aversion pour les femmes ; elle refusa de recevoir
en 1816 la Princesse de Galles, de passage au Liban.
Elle était difficile, elle ne mangeait avec
personne, dit Lamartine qui fut son hôte et
se nourrissait de pain et de fruits, pour Pierre
Benoit : « Elle passait la moitié de
son temps à interroger les astres et le reste
en conversations ; elle était une causeuse
intarissable, elle parlait de dix à quatorze
heures sans quitter son diwan ».
Les avis de ses visiteurs furent partagés;
celui de Lamartine fut enthousiaste ; mais un autre
François Laborde, la taxa en 1827 de ‘vieille
folle’ ou de gâtisme et de sénilité,
pour Dr. Madden elle était un génie
et une intelligence peu commune etc…
Les rêves, les prédictions des astronomes
furent sa préoccupation préférée…Bruce
lui attribuait des visées politiques : d’un
empire de Palmyre ; elle projetait un mariage avec
Ibn Seoud. A-t-elle pensé réincarner
Zénobie ou Cléopâtre, ou Balkis
ou la Religieuse Fantastique ‘Hindiyé’…
Mais elle était loin, très loin, d’égaler
‘Marie Madeleine’ qui en plus de ce qu’avait Esther,
elle avait un parfumeur cananéen, et elle
a approché le Seigneur Dieu.
Elle a contrecarré les missions des agents
de Napoléon, les agents secrets de lady Esther
se trouvaient partout. Pour venger son ami Boutin
tué par les Alaouites ; elle prépara
une compagne contre le pays des Alaouites, 52 villages
brûlés et plus de trois cents Alaouites
massacrés, récoltes détruites,
arbres coupés, femmes et enfants enlevés,
maisons incendiées etc…
Amoureuse à plusieurs reprises, de Boutin,
ou du capitaine Loustaunou fils de général…
mais sans chance. On vantait sa chasteté,
son courage, elle ne connut d’amour que pour la
gloire.
Pas d’hommes dans sa vie, a écrit Pierre
Benoît à part peut-être ce jeune
et nébuleux anglais tué en Espagne.
La légende se mêle à la vérité
et il est difficile de les séparer.
Les relations de la châtelaine de Djoun avec
l’Emir Béchir furent des plus tendues. En
1812 Béchir lui avait réservé
une magnifique réception.
Elle tiendra tête à l’Emir pendant
plus de vingt ans, il avait aimé se débarrasser
de cette hôte hostile. L’Emir fut pour elle
un monstre voisin, un démon, son pire ennemi
‘Je ne serais pas une vraie Pitt si je m’inclinais
devant un monstre qui ‘charge de chaînes le
cou et les pieds de vieillards, crève les
yeux arrache les langues.’ Elle disputa à
l’Emir son prestige et son autorité. Après
la bataille de Navarin, les Français de Saïda
se réfugièrent à Djoun. C’est
la maison de Lady Esther qui fut terre inviolable
d’asile et non plus le Liban de Béchir’.
L’ombrageux Béchir voulait se venger de cette
Etrangère et ne savait pas comment. En 1827
il fit publier dans le pays l’ordre que ‘tous les
serviteurs de la Dame ‘Sitt’ devaient quitter son
service sous peine de perdre leurs biens et leurs
vies’. Il alla même jusqu'à cerner
sa résidence. Lady Esther riposta demandant
l’intervention de l’ambassade anglaise à
Istanbul, et la Sublime porte dépêcha
immédiatement un Pacha, ambassadeur pour
recommander Lady Stanhope.
En 1831 lors de l’invasion égyptienne au
Liban éclata la haine et la fureur de l’Anglaise
Lady Esther contre Béchir et ses alliés.
Elle eut un rôle actif et des espions partout,
des informations des agents. Hommes de lettres,
romanciers, poètes, généraux,
ambassadeurs, agents, espions etc… nombreux sont
ceux qui ont approché Lady Esther, el Sitt,
qui donnèrent leur opinion, de la folie au
génie, ses biographes ont insisté
sur ses côtés étranges excentriques,
ses illuminations, ses fouilles étranges
à la recherche des trésors antiques.
Le commerce des Astres, les prophéties, les
miracles, les affaires…
Sur les collines Calcinées de Djoun il ne
reste rien de l’étrange château sur
lequel régna durant vingt années cette
châtelaine des plus étranges.
Joseph
MATAR
- Lady
Esther Stanhope, Djoun:
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la Vue << (2010-06-15)