Le vignoble
de Ksara se situe dans la vallée de la Bekaa;
il s'étend de la Bekaa centrale jusqu'à
la Bekaa ouest. A 1000 mètres d'altitude,
la vallée de la Bekaa possède l'avantage
d'avoir un climat méditerranéen avec
des hivers frais pluvieux et neigeux, des printemps
doux avec une très faible pluviosité
et des étés assez chauds et secs,
souvent même trop secs. Les coteaux et la
vallée créent des microclimats qui
influent sur la production des vins. Les nuits estivales
fraîches viennent compenser les journées
très ensoleillées et chaudes.
Ksara
l'établissement viticole le plus ancien du
pays ne fait que suivre une tradition vieille de
plus de cinq mille ans : Les Phéniciens,
commencèrent à fabriquer et à
exporter leur vin vers 3000 avant J.-C. La viticulture
au Liban trouve probablement son origine avant l'ère
des Phéniciens. Il est communément
admis que le pays fut, autour de 7000 avant J.-C.,
le berceau de la viticulture grâce à
sa situation à l'intérieur du triangle
que l'on peut tracer entre le Caucase au nord (aujourd'hui
l'Arménie et la Géorgie), la Mésopotamie
à l'est (aujourd'hui l'Irak) et la Palestine
du sud à l'ouest. Or c'est dans cette région
que les historiens situent la fabrication des premiers
vins, autour de 8000 avant J.-C.
Dans
la Bible, il est aussi spécifié que
Noé, le capitaine de l'arche, devint le premier
vigneron, après le Déluge. Le livre
de la Genèse raconte ensuite l'effet que
le vin eut sur lui: « Noé se mit à
cultiver la terre et il planta une vigne. Il en
but le vin et s'enivra, de sorte qu'il se mit tout
nu sous sa tente. »
L'arche
de Noé se serait-elle arrêtée,
comme on le murmure, sur le mont Sannine au Liban,
et non sur le mont Ararat dans le Taurus à
l'est de la Turquie? Se pourrait-il que la tombe
de Noé se trouve dans la mosquée de
Kerak, un village juste à la sortie de Zahlé,
à quelques kilomètres de Château
Ksara?
Nous
pouvons aussi évoquer la légende de
Bacchus, le dieu du vin romain, à qui est
dédié le magnifique temple de Baalbek.
L'histoire de Bacchus n'est rien de plus qu'une
légende, mais nous savons que les Phéniciens
– et peut-être aussi les Croisés français
sur le chemin du retour – jouèrent un rôle
majeur dans la diffusion du vin libanais à
travers le monde.
Frère
Mold, un Jésuite qui arriva dans la région
de la Bekaa en 1892, fait les observations suivantes
dans son journal: « La vallée de la
Bekaa est considérée comme la Creuse
de Syrie. Elle est entourée par de hautes
montagnes et c'est une vallée de 25 lieues
de long et 4 lieues de large. Baalbek et Chalcis
en sont les deux villes les plus importantes, bien
que de leur splendeur passée il ne reste
aujourd’hui que des ruines. »
Il
continue : « On ne trouve une telle abondance
d'eau nulle part ailleurs dans le monde. Les sources,
dont la plus grande est le Litani, sont tellement
puissantes que les habitants locaux les appellent
rivières. Le marais de Tanail est fréquenté
par des centaines de pélicans, d’oies et
de canards. C’est, en été, l’endroit
que choisissent les bédouins pour nourrir
leurs troupeaux. » Cette description est cependant
suivie d’une remarque plus sombre : « Cinq
de nos frères sont tombés dans les
émeutes dues aux affrontements de 1860. »
Puis il enchaîne pour se plaindre de la façon
exécrables dont les Turcs ont administré
la région – c’est-à-dire sans tirer
parti de sa fertilité – et relève
que de nombreux habitants ont été
forcés de la quitter à cause de la
situation économique désastreuse.
Toutefois,
une note plus positive se dégage : «
Dans le vignoble du Clos Saint Alphonse, saint tout
juste canonisé par le pape, les vignes sont
appréciées… Il se trouve prés
du village de Kerak, dans lequel on peut voir la
tombe de Nabi Noé, un vigneron célèbre.
»
Le
père Kirn, qui découvrit le potentiel
du terroir de Ksara et il convainquit les frères
de faire pousser du raisin pour la viticulture.
Les moines du Liban fabriquaient déjà
du vin doux, avec la permission de leurs occupants
turcs, à condition qu'il soit destiné
aux rituels religieux. En fait, les Ottomans fermaient
les yeux sur la consommation d'alcool. L’Arak –
une liqueur anisée du Liban similaire au
raki en Turquie – était largement consommé
et répandu dans tout le Moyen-Orient.
Kirn,
fit venir un viticulteur, le père François
Wuillamoz. Ce dernier, apporta son expertise technique
au projet de fabrication de vin de la mission. Les
résultats furent si bons que les frères
purent enfin distribuer les ceps aux habitants,
jusque-là sceptiques. « Les champs
de blé et de muriers furent remplacés
par des vignes, que les gens de la région
surnommèrent vignes françaises.
En
1887, le père Kirn mourut. Son successeur,
le père Bernardet, supervisa les changements
qui allaient amener Ksara à devenir une entité
indépendante du monastère de Tanail.
1898
est une date importante dans l'histoire de Ksara,
car c’est à ce moment-là que des galeries
datant de la période romaine furent découvertes.
Aujourd'hui, elles s'étendent sur deux kilomètres
sous l'établissement et servent d'entrepôt
pour le vin. Les premières furent découvertes
par des orphelins qui travaillaient sur la propriété.
L’un d’entre eux, Jean Gharios (qui devint plus
tard moine au monastère, où il resta
jusqu'à sa mort en 1976, à l’âge
de quatre-vingt quatorze ans), écrit dans
son journal, en mars 1898 : « L’hiver est
particulièrement long et froid. Nous n’avons
pas pu travailler aux vignes et, comme nous n’avions
rien à faire, frère Guichard nous
a autorisés à chercher les galeries
qu’une fable décrivait. » Ce fut toutefois
plus par accident que grâce à un véritable
travail de détective que Gharios et ses amis
tombèrent sur les galeries. C’est en voulant
enfumer un renard qui terrorisait les poules que
les jeunes garçons les découvrirent.
En
1972 le Vatican encouragea ses monastères
et missions implantés dans le monde à
vendre tous leurs commerces. La production viticole
de Ksara atteignait alors le million et demi de
bouteilles par an. Château Ksara fut vendu
a un groupe d'hommes d'affaires local, dirige par
Jean-Pierre Sara, ancien élève des
Jésuites qui devint vice-président
directeur général par la suite.
De
leur côté, les investisseurs savaient
qu'ils achetaient le plus grand domaine viticole
du Moyen-Orient et voulaient encore l'agrandir.
« Notre ambition d’exportation se tournait
principalement vers la Syrie », explique Khalil
Sara, qui se découvrit une passion pour le
vin à l’université d’Oxford dans les
années 1960. « Nous n’étions
situés qu’à 60 kilomètres de
Damas. Nous voulions être les meilleurs sur
le marché. C’était avant que des restaurants
libanais ouvrent partout dans le monder et que Ksara
exporte son vin dans une trentaine de pays ».
Malgré
cet âge d’or, le Liban n’était pas
immunisé contre les perturbations régionales.
En 1975, après des années de tensions
sous-jacentes, principalement au sud, le pays se
trouva divisé en deux.
Il
ne suffisait pas de vouloir faire planter des cépages
nobles, il fallait encore trouver le terroir sur
lequel les planter. La compagnie possédait
25 hectares à Ksara mais avait besoin de
plus d'autonomie. Ksara planta alors les nouvelles
vignes sur 45 hectares à Mansoura. Ksara
passa un nouvel accord avec le monastère
de Tanail pour la plantation de 20 hectares de Cabernet
Sauvignon et de Syrah. De plus, le domaine planta
40 hectares sur une terre appartenant à l'institut
Schneller,
L'entreprise
a pris de l'envergure. Aujourd’hui la réputation
de Château Ksara en tant que plus ancien et
plus grand domaine viticole du Liban est assurée.
Afin de produire 2 millions de bouteilles, le domaine
récolte presque 2000 tonnes de raisin sur
ses 300 hectares.
Une
fois les vignobles agrandis, la production pourra
passer à 2,7 millions de bouteilles par an.
Château Ksara s'agrandit non seulement pour
pouvoir vendre plus, mais aussi pour améliorer
la qualité de ses vins. Château Ksara
a pu conforter sa réputation et sa bonne
position sur le marché. Ksara a su jouer
de son histoire et exploiter ses atouts. La compagnie
a mis l'accent sur ses traditions à travers
son nom et son lignage, et sur sa noblesse a travers
sa qualité. Ksara est perçu comme
une compagnie ancienne avec un esprit jeune.