Georges Naccache, pionniers du journalisme au Liban

Georges Naccache 1904-1972
Directeur - Propriétaire du journal L'Orient

Il y a trente ans mourait Georges Naccache un des pionniers du journalisme au Liban. C'est avec un sentiment de respect que nous nous penchons aujourd'hui sur la vie de cet éminent penseur et journaliste.

Certes, il est difficile de résumer sa vie car il représente l'esprit d'une époque. Sa longue et pénible mission de journaliste a été marquée par un attachement sincère et solide au Liban. Son patriotisme, sa franchise et sa haute culture imposaient à tous le respect, l'admiration et l'affection. Il était, sans conteste, un être rayonnant de chaleur humaine et d'intellectualité et c'est là la vraie grandeur.

Né en Egypte en 1904, décédé à Beyrouth en 1972, Georges Naccache passera plus de quarante années de sa vie au service de la presse et du Liban. Il a milité dans tous les domaines et sans relâche pour la renaissance politique, journalistique, technique et sociale de notre pays et du Proche-Orient.

Il fonda, en 1924, avec Gabriel Khabbaz, le quotidien L'ORIENT.

Les éditoriaux rédigés par lui, bénéficiaient au Liban comme à l'étranger d'un vaste public et d'ardents admirateurs. S'il laisse le souvenir d'un grand polémiste, comparable à Rochefort, son ambition initiale était certainement littéraire; d’où, son affection pour les poètes et d’où son respect du talent chez les autres.

En 1936, il contribua à la fondation des Phalanges.

Enfin à partir de 1937, il introduisit dans le pays une conception moderne du journalisme. Son journal de quatre pages atteignit facilement les 16 ou 18 pages et devint un organe d'information mondiale. Nommé ambassadeur du Liban à Paris (1966-1967), il fit montre d'un sens de la diplomatie remarquable et se révéla un représentant éminent de la culture latine. Mais cela ne lui suffisait guère; il diffusa largement, la pensée libanaise en France et en Europe. En outre, il contribua, notablement, au rapprochement de la France et des Etats Arabes et conclut l'accord de prêt et de bail, pour le développement des travaux d'équipement.

Pour ce qui est du problème palestinien, il mena une orageuse compagne contre l'expansion sioniste dans le monde en réclamant, constamment, la réintégration des refugiés dans leur foyer en Palestine.

En outre il alliait à une rectitude morale une ample connaissance des affaires de l'Etat. Son intransigeance surtout en ce qui pouvait nuire à l'intérêt supérieur du Liban était notoire. Plusieurs fois ministre des travaux Publics et d'Information, nommé Président du conseil Exécutif des grands projets de Beyrouth, Georges Naccache fit décongestionner les entrées de la Capitale en perçant plusieurs artères qui ont marqué son passage au pouvoir.

Quoi qu'il en soit, ce grand disparu dont la personnalité a forcé le respect de tous et qui fut ingénieur, ministre, diplomate et écrivain, demeure surtout le grand penseur et le journaliste.

Dans sa vie ce qui tient la première place, c'est le travail: le travail constant, intellectuel, quotidien. Il a toujours agi en Libanais et plus exactement en apôtre Libanais de la Presse.

AU SERVICE DU LIBAN

Georges Naccache aura accompli au service du Liban cette mission d'avoir tenté de s'accomplir lui-même, d'avoir été sans conteste sur le double point national et international, l'un des tout premiers journalistes de ce temps.

Pour chacun de nous, l'heure peut et doit revenir où la mort cesse d'apparaître comme une agression pour n'être plus qu'une échéance.

Peu importe qu'elle nous surprenne toujours, qu'elle nous saisisse au milieu d'un projet ou d'un article.

D'avance nous savons que nous ne pourrons jamais mettre le dernier point à notre dernier éditorial. Ne jamais franchir l'étape finale de notre dernière course. Il ne dépend de nous de rien achever. Mais l'encre et la sueur dont nous serons encore trempés, et les larmes et le sang.

C'est quelqu'un d'autre qui prend sur lui de les essuyer, à son heure, une fois pour toutes; quelqu'un qui est la Toute-puissance, la Miséricorde infinie.

Ambassadeur en France en 1966-67, il contribua au rapprochement de la France avec les pays arabes et conclut l'accord de prêt et bail Grace auquel d'importants projets d'équipement ont pu être exécutés. Mais Georges Naccache est resté journaliste jusqu'au bout, il dictait le titre et le chapeau de l'information principale de la première page.

Incisif, cinglant, plein de verve dans ses raisonnements. Il était le représentant le plus illustre d'un monde pour qui la langue française est la plus malléable de toutes les analyses et de toutes les polémiques. Tout lui était si justement accessible dans le domaine de la pensée. Avec Georges Naccache disparaît une philosophie du journalisme plein de contrastes, il dégageait à la fois autant de modestie que de culture. D'emblée, il situait les hommes et les choses dans leur contexte véritable.

Avec lui les échanges revêtent la forme de communications télégraphiques, tant il était doué d'un système de références intellectuelles.

Une imagination Créatrice

Cette imagination lui a permis de réaliser de belles performances et de se projeter toujours en avant. La vie, il l'a vécue sous toutes ses formes avec intensité comme il savait vivre. Elle lui a sans doute apporté beaucoup de satisfaction et quelques déboires.
Vers la fin de ses jours, il manifestait quelquefois une sorte de lassitude.

Disons enfin que jusqu'à la dernière minute il aura été l'homme qui porte témoignage: Le témoignage de la primauté de l'esprit et des raisons de survivre.