Les Temples Romains du Liban par George Taylor
Editeurs d'EL Machrek de Dar, Beyrouth
Introduction
Parmi toutes les oeuvres architecturales des Grecs
et des Romains, les temples construits pour les dieux
immortels expriment mieux qu’aucune autre forme
de monument la perfection de l’Art classique.
On ne saurait s’en étonner - et, en vérité,
le contraire serait surprenant - puisque la recherche
d’une forme à donner à l’effigie
du dieu et la nécessité de créer
un abri digne de recevoir cette image divine, ont
été les idées-forces qui ont
animé le génie créateur dans
plusieurs arts, en particulier dans la sculpture.
Les dieux furent l’objet de l’adoration
des hommes bien avant qu’on ne construisit des
demeures pour leurs statues. Les hautes montagnes,
les sources des rivières, Les grottes et les
arbres furent considérés comme demeures
des dieux et ce fut dans ces sanctuaires naturels
- sans ornement fait de main d’homme - que les
dieux reçurent tout d’abord l’hommage
des humains (Pl. 101). La fraîcheur de la montagne
et de ses cascades, la pâle clarté d’une
caverne, l’ombre profonde d’un arbre durent
être particulièrement appréciés
parmi les ardeurs dévorantes du soleil méditerranéen.
Aussi semble-t-il tout naturel que de tels sites aient
été considérés comme demeures
des dieux. Il ne faudrait pas croire cependant que
la fraîcheur et l’ombre aient suffi à
déterminer le lieu où la divinité
devait être honorée. L’endroit
devait encore - cela va sans dire - être apte
à inspirer à l’âme du dévot
une sorte de crainte sacrée, du respect. L’offrande
de dons propitiatoires et le besoin d’un meuble
pour les recevoir auraient amené à dresser
des autels dans ces oratoires naturels ; puis avec
le temps la nécessité d’abriter,
de protéger ces autels aurait conduit à
construire le premier temple.
Il semble logique de mettre en relation l’adoption
du plan d’une maison pour loger le dieu avec
la représentation de la divinité sous
forme humaine. Plus l’effigie divine se rapprochait
de l’image de l’homme, plus étroitement
sa demeure devait-elle se conformer au plan d’un
habitat humain. Et parce qu’une idole, digne
de recevoir l’expression de la vénération
des hommes, devait être mise en honneur par
une demeure d’homme capable de susciter l’admiration,
l’habitation des souverains, le palais royal,
fut choisi pour modèle du premier temple.
On est tenté de voir dans le plan d’un
palais homérique l’organisation de base
du temple grec et romain : le mur extérieur,
la cour, le mégaron du palais, correspondant
à l’enceinte du temple, le téménos,
le sanctuaire. Ce serait là une grossière
simplification de l’histoire du développement
du temple, sans aucun doute. Cependant il est utile
de garder présent à l’esprit ce
parallèle quand on doit porter son attention
sur les temples romains du Liban. Un mur en gros appareil
entoure les temples du Liban partout où la
configuration du sol a permis l’aménagement
d’une terrasse. Une aire dallée sépare
le mur de clôture du sanctuaire. Celui-ci est
surélève - souvent sur une immense substructure
en plate-forme - jusqu'à une hauteur d’où
il domine le mur de clôture. Une autre analogie
unit le palais homérique au temple romain,
nous voulons dire l’emplacement de l’autel.
Il était situé entre la porte d’entrée
du mur de clôture et le sanctuaire.
Bien que les ressemblances entre le plan du palais
royal et celui du temple ne puissent être poussées
plus loin, le temple grec (et donc le temple romain,
car le temple est le plus grec de tous les édifices
romains) est certainement le développement
logique d’une habitation ordinaire et le hall
d’une grande maison. Une très intéressante
habitation de l’époque hellénistique
a été mise au jour à Priène,
en Asie Mineure. Le haut mur de clôture avait
une ouverture sur un des petits côtés,
qui conduisait à une grande cour. Perpendiculairement
à la cour, regardant vers l’entrée,
se trouvait la plus grande pièce de la maison.
On entrait par un porche formé de deux colonnes
en avant des murs latéraux. Plusieurs temples
au Liban reproduisent cette disposition de la maison
hellénistique de Priène, en particulier
les temples de Qalaat Fakra et de Qsar Naous. Le plan
au sol du temple de Qalaat Fakra, et ceux de la maison
de Priène, et du palais de Troie sont représentés
sur la Figure1. Mais, nous le répétons,
il ne faut pas pousser trop loin cette ressemblance
: l’influence de la culture et de la tradition
sémitique sur les temples de la province romaine
de Syrie ne doit pas être perdue de vue.
Exception faite du petit temple circulaire de Baalbek
(Pl. 48-51), les temples romains au Liban sont de
trois types différents : à antes, prostyle,
ou périptère. Un bon exemple de temple
à antes, in antis, disaient les Romains, est
fourni par le site de Ain Hircha. Les murs latéraux
de l’édifice se prolongent sur toute
la longueur du podium et forment les supports d’angle
pour les poutres et le toit. Deux colonnes, intermédiaires
entre les murs latéraux, fournissent un point
d’appui aux poutres et au toit. Ces deux colonnes
donnent une certaine majesté au porche d’entrée.
A Ain Hircha les colonnes ont disparu mais leurs bases
se voient encore clairement (Pl. 1).
Dans le temple prostyle le porche est allongé
et les deux colonnes que nous avons observées
dans le temple à antes sont placées
en avant juste derrière la ligne du mur de
côté. Deux colonnes supplémentaires
fournissent les supports d’angle pour les poutres
et le toit, et une architrave réunit ces colonnes
aux piliers qui terminent les murs latéraux.
Bziza (Pl. 2) donne un exemple typique de temple prostyle,
mais la profondeur accrue du porche apparaît
mieux a Qsar Naous, où deux colonnes de plus
dans la ligne des murs latéraux (une de chaque
côté) permettent d’allonger l’aire
du porche jusqu'à occuper un tiers de la surface
de tout l’édifice (Pl. 109). Le prostyle
était le plan favori des Romains pour la construction
des temples.
Le temple périptère, peut-être
la forme de temple la plus parfaite, comprend une
rangée de colonnes sur les quatre côtés
de l’édifice, formant ainsi un péristyle
circulaire à quatre colonnades. Le podium est
donc élargi pour supporter les colonnes qui
s’alignent parallèles aux murs latéraux,
et le nombre de colonnes de la façade fut augmenté
jusqu'à six ou huit pour meubler la largeur
accrue du podium. Le temple périptère
le mieux conservé se trouve à Baalbek
où les sections nord et ouest du péristyle
sont encore intactes (Pl. 3). Exception faite du Temple
de Jupiter Héliopolitain (voisin du précèdent)
dont seules se dressent encore les six célèbres
colonnes, aucun autre temple périptère
au Liban n’a conservé les colonnades
de son péristyle.
Il faut dire quelques mots de l’orientation
des temples. Presque tous les temples au Liban sont
orientés de telle façon que le soleil
levant darde ses rayons dans le sanctuaire. Un grand
nombre sont orientés au sens étymologique
du mot, c’est-à-dire sont tournes exactement
vers l’orient, droit à l’est. Un
rayon du soleil levant peut passer à travers
la baie d’entrée et baigner de sa lumière
la statue colorée de l’adyton. La baie
d’entrée, il faut le remarquer, n’est
jamais masquée par les colonnes du porche;
quelquefois cependant les colonnes sont espacées
de façon inégale, justement pour ne
pas aveugler l’embrasure de la baie d’entrée.
Bien que la plupart des temples du Liban regardent
l’est, il y a quelques temples qui sont orientés
vers le sud ou l’ouest. Les temples tournés
vers le sud se rencontrent en association avec un
temple plus grand, ces derniers plus importants étant
orientés à l’est. Par exemple,
il y a un petit temple à Niha (Pl. 10) disposé
à angle droit avec le Temple de Hadaranès
; et un autre à Hosn Niha qui est situé
en travers par rapport à son voisin plus grand
(Pl. 15). Les temples orientés à l’ouest
sont rares (celui de Deir el-Qala‘a est le plus
connu) et lorsque cela se rencontre la raison semble
être que le soleil couchant peut effectivement
éclairer de son faisceau lumineux la statue
du sanctuaire.
L’orientation des temples dans le massif de
l’Hermon
est particulièrement intéressante. On
a soutenu que les temples romains qui entourent l’Hermon
étaient orientés vers la petite protubérance
conique de Qsar es-Sebayb qui est en effet le point
le plus élevé de la chaîne et
le site sacré, protégé par une
clôture aux époques romaine et pré-romaine.
Les passions archéologiques s’exercent
encore avec virulence soit contre soit pour cette
opinion. Les temples qui environnent l’Hermon
sont en commençant par le sud : Hebbariyé
(pl. 56), Ain Hircha (Pl. 1, 57 et 58), Ain Libbaya,
Nebi Safa (Pl. 59, 60 et 61), Aaqbé (Pl. 62),
Aaiha, Bakaa (Pl. 63 et 64), Khirbet el-Knissé
(Pl. 65 et 69), Yanta (Pl. 70 et 71), Deir el-Aachayer
(Pl. 72 à 75), Rakhlé, Burkach et Er-Rime.
Le premier point à remarquer c’est que
plusieurs de ces temples ne sont pas orientés
vers le Mont Hermon. Les quatre temples situés
au nord : Deir el-Aachayer, Bakka et Khirbet el-Knese
(avec ses deux temples) et Yanta regardent l’est
ou le sud-est, tournant presque le dos à l’Hermon.
Il est vrai que Aïn Hircha, Aaqbe et Nebi Safa
sont axés sur l’Hermon mais leur position
à l’ouest rend inévitable cette
orientation pour qu’ils puissent recevoir dans
le sanctuaire les rayons du soleil levant. Il y a,
selon nous, des preuves manifestes que c’est
vers l’est et non vers le sommet du Mont Hermon
que ces trois temples étaient tournés.
La première c’est que le temple de Nebi
Safa, bien qu’il dispose d’une vue dégagée
vers tout le massif de l’Hermon, ne présente
pas sa baie d’entrée vers la pointe du
Qsar es-Sebayb. La direction de ses murs latéraux
s’écarte de plus de trente degrés
de ce cap (Pl. 59 et 61). La seconde: les murs latéraux
du temple d’Aaqbe, également situé
sur une colline d’où la vue sur l’Hermon
est complètement dégagée, ne
sont pas axés sur ce sommet mais sur l’extrémité
nord-est de l’Hermon, vers un chaînon
du massif qui se trouve masqué par une crête
intermédiaire (pl. 62). Disons donc en clair
que l’orientation vers l’Hermon n’était
pas une question de grande importance pour les constructeurs
de ces temples, car s’ils avaient désiré
aligner leurs temples sur cet azimut de la pointe
de l’Hermon ils auraient pu le faire sans ajouter
une seule difficulté à leur tache. La
troisième preuve: le temple de Aïn Hircha
est orienté exactement à l’est,
ce qui signifierait une erreur d’environ trente
degrés si l’on soutient qu’il devait
être axé sur le sommet de l’Hermon;
en fait, le massif principal de l’Hermon (en
y comprenant la pointe de Qsar es-Sebayb) n’est
même pas visible depuis la porte du temple de
Aïn Hircha. Pour moi, cela ne fait aucun doute
que l’orientation de ce temple vers le sommet
de l’Hermon est fortuite et non intentionnelle.
L’opinion, qui tient pour intentionnelle cette
orientation, semble venir d’une suggestion émise
par le Dr. Edward Robinson, le scholar en exégèse
biblique, qui parcourut la région de l’Hermon
dans l’été 1852. Robinson a étudié
les temples de Hebbariyé, Aaiha, Deir el-Aachayer,
Nebi Safa et Rakhlé. A propos du dernier site,
sur le versant est de l’Hermon, Robinson dit
de la ruine que sa façade regarde vers l’ouest,
« vers les neiges de l’Hermon »,
et que son extrémité est était
« d’un dessin semi-circulaire, comme celui
des églises grecques ». C’est à
partir de ce rapport, semble-t-il, que s’est
développée la théorie de l’orientation
des temples vers l’Hermon.
Maintenant encore il existe bien en réalité
un édifice ancien dont la façade est
tournée « vers les neiges de l’Hermon
», mais il s’agit d’une basilique
chrétienne, non d’un temple. Le petit
temple romain, remarquable par la forme absidiale
de son adyton, se trouve au nord de la basilique.
Ses ruines furent observées par Robinson mais
non décrites.
La question de l’orientation nous amène
à poser un autre problème : quel était
le but de ces édifices? Il y a une vérité
première qu’il faut bien mettre en évidence,
c’est que les Romains ne faisaient pas de leurs
temples le même usage que nous-mêmes faisons
de nos églises.
Les fidèles ne se rassemblaient pas à
l’intérieur du temple romain. La division
de nos églises en nef et en chœur semble
se calquer si exactement sur la division des temples
romain et grec en cella et en adyton, que nous sommes
inclinés à considérer le temple
comme une église, comme un lieu d’assemblée.
C’est une erreur. Le temple était construit
comme une demeure pour l’effigie du dieu, non
comme une maison pour rassembler les fidèles.
Les prêtres, les augures et les personnes marquées
d’un caractère sacré franchissaient
le seuil du temple, les fidèles ne le franchissaient
pas.
Cette donnée justifie la position de l’autel
principal et explique aussi la nécessité
d’une aire protégée par une clôture
quand l’entrée du temple ne se trouvait
pas sur le bord d’un forum. L’autel, dédié
à la divinité à laquelle le temple
était consacré, se trouvait dans la
cour en face du temple, en bas des degrés qui
conduisaient au porche (Pl.21 et 36). Les prêtres
qui officiaient et les assistants du sacrificateur
se tenaient près de l’autel. Les fidèles
remplissaient l’espace entre l’autel et
l’enceinte. Tous étaient tournés
vers la porte principale du temple, regardant vers
la statue, à l’intérieur. En l’absence
d’une aire pavée ou dallée (par
exemple un forum) voisine du temple, la cour incluse
dans l’enceinte avait pour but d’accueillir
les fidèles. La position de l’autel obligeait
ceux-ci à se tourner sinon vers l’effigie
de l’adyton, du moins en direction de l’entrée
de la cella.
Je pense que dans le plus grand nombre de temples
romains au Liban, le moment suprême du sacrifice
aux grandes fêtes devait coïncider avec
les quelques minutes où le soleil frappait
de ses rayons la statue du dieu. Le prêtre qui
officiait à l’autel pouvait lever les
yeux vers le porche et apercevoir par la baie de la
grande porte la pénombre de l’intérieur
du temple. Les rayons du soleil arrivaient soudain
en oblique à travers la porte et le prêtre
- mais peut-être pas les fidèles rassemblés
- apercevait l’effigie du dieu baignée
de lumière. C’est à ce moment,
croyons-nous, que le coup abattait la victime du sacrifice.
L’animal offert en sacrifice devait, s’il
était de petite taille, être conduit
à l’autel sans être entravé;
s’il s’agissait d’une bête
de forte taille on l’attachait à une
longue corde pour l’amener près de l’autel:
une courte longue aurait indiqué un sacrifice
non consenti, offert a contrecoeur.
Il est donc clair que l’orientation du temple
est un élément essentiel dans le sacrifice
rituel. Avec cette réserve cependant, déjà
notée plus haut, que tous les temples ne sont
pas orientés droit à l’est. Serait-il
concevable que les constructeurs des temples aient
commis de grosses erreurs d’orientation? Certainement
pas. Au contraire, le fait que l’axe d’un
temple puisse s’écarter de quelques degrés
de la direction exacte de l’est me parait indiquer
qu’on calculait soigneusement l’orientation.
Je crois que la preuve est faite désormais
qu’on s’efforçait de diriger l’axe
du temple vers le point de l’horizon où
le soleil se levait au jour de la fête du dieu
auquel le temple était dédié.
Ceci, nous semble-t-il, explique les variations assez
notables dans l’orientation des longs côtés
des temples: ces variations d’axe correspondent
aux différentes positions du soleil à
son lever suivant le cours de l’année.
Un temple orienté vers le soleil levant à
la date du 21 juin n’aura pas exactement la
même orientation que celui qui serait axé
sur le point de l’horizon où apparaît
le soleil à son lever, à la date du
1er septembre par exemple.
Il suit de cette conclusion que la fête à
tout le moins d’une divinité importante
tombait au jour où la statue du sanctuaire
recevait les premiers rayons du soleil. Même
en s’appuyant sur ce postulat il ne serait possible
de déterminer avec une certitude suffisante
à quelle divinité particulière
les temples étaient consacrés que pour
un nombre très restreint de sanctuaires. Nous
connaissons grâce aux écrivains antiques
quelques dédicaces certaines, par exemple le
temple d’Afka dédié à Venus.
Des inscriptions lithiques nous fournissent la même
certitude pour quelques autres, par exemple pour l’attribution
à Jupiter Héliopolitain du grand Temple
de Baalbek et de celui de Deir el-Qalaa; pour l’attribution
à Atargatis de celui de Qalaat Fakra ; mais
la possibilité d’arriver à une
conclusion sûre pour l’attribution d’un
grand nombre de temples du Liban nous manque encore
à l’heure actuelle. La déesse
Némésis est liée à Maqâm
er-Rabb (appelé aussi dans la région
Beit Jallouk) par une inscription et un autel portant
son nom et trouvé sur le site; cependant ces
indications ne sont pas suffisantes pour établir
avec certitude que Maqâm er-Rabb est un temple
consacré à Némésis. Même
les temples de Baalbek, objet de tant d’études,
défient une identification positivement indéniable:
certes le grand temple peut être attribué
avec quelque assurance à Jupiter Héliopolitain,
mais l’identité du dieu adoré
dans le petit temple et de même l’identité
de celui qu’on honorait dans le temple rond
demeurent sujettes à discussion.
Ce qui est sûr, cependant, c’est que Jupiter
Héliopolitain (ou son homologue sémitique
Haddad) était honoré dans de nombreux
temples romains du Liban, et que ses effigies à
Baalbek à Deir el-Qalaa offrent un très
grand intérêt (Pl. 38). Comme conducteur
du char du soleil, le dieu est représenté
avec un fouet dans la main droite, et puisqu’il
est aussi le dieu de l’orage et de la pluie,
il porte le foudre et une gerbe d’épis
de blé dans la main gauche. Dans une région
aussi ensoleillée, bien arrosée et fertile
que le Liban, les symboles du fouet, de la foudre
et des gerbes d’épis sont particulièrement
bienvenus; aussi opportune nous parait être
la présence des taureaux qui flanquent l’effigie
de Jupiter Héliopolitain et qui symbolisent
la force fécondante du dieu. Les dévots
de ces sanctuaires pourraient avoir mis en parallèle
les grondements du tonnerre, qui accompagnaient si
souvent les pluies fertilisantes, et les mâles
beuglements de vigoureux taureaux. La gaine du dieu
ou sa cuirasse, est divisée en carreaux contenant
les bustes des divinités Soleil, Lune, Mars,
Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne. Ce sont les
dieux, notons-le en passant, qui président
aux jours de la semaine, et le symbolisme de ces carreaux
de la cuirasse souligne l’emprise très
ancienne en ces régions de l’astrologie.
Les temples romains du Liban peuvent se répartir
en trois groupes principaux. Le premier serait le
groupe de la plaine de la Beqaa a au nord de la route
Chtaura-Damas. Le second comprendrait les temples
de la région du sud de cette même route
en y ajoutant le Wadi et-Taym et le versant ouest
du massif de l’Hermon. Le troisième groupe
couvrirait l’aire délimitée par
la ligne de crête de la chaîne du Liban
et les frontières nord et sud joignant ces
crêtes à la mer. Il ne s’agit donc
pas d’une division géographique proprement
dite : il n’y a aucun critère géographique
qui justifie l’appartenance des temples de Kfar
Zabad au premier groupe et celui de Majdel Aanjar
au deuxième. Mais la route Chtaura-Damas divise
la plaine de la Beqaa a en deux moitiés faciles
à identifier et il est pratique de s’y
référer quand on projette de visiter
plusieurs temples. Aussi, à l’exception
des trois premières planches qui illustrent
les types de temple romain décrits plus haut,
les planches de cet ouvrage sont groupées suivant
les trois aires que nous venons d’indiquer.
L’index ne fournit pas seulement la liste des
planches et des temples cités dans le texte
mais indique aussi l’itinéraire à
suivre pour atteindre chacun des sites. Puisque Aley
– Sofar - Dahr el-Baidar - Chtaura reste la
voie la plus rapide pour arriver de Beyrouth dans
la Beqaa, les indications de route pour tous les sites
du premier et deuxième groupe partent de Chtaura.
On pourra remarquer que la plaine côtière
du Liban est singulièrement dépourvue
de temples romains. Mais il ne faudrait pas en conclure
que les grandes cités de la côte ne possédaient
aucun monument sacré d’importance, à
l’époque romaine. Beyrouth, Byblos, Sidon,
Tyr, Tripoli, Botrys (Batroun), Césarée
du Liban (Arqa) connaissaient toutes une prospérité
assez grande pour leur permettre de battre monnaie
à l’époque romaine. Toutes ces
cités comptaient des temples. Les monnaies
nous en fournissent la preuve formelle. Le revers
d’une monnaie de Beyrouth, par exemple, porte
la représentation du Temple d’Astarté
(Vénus). Cette pièce a été
frappée sous le règne de Caracalla (211-217
de notre ère) et montre sur l’autre face
le buste de Julia Domna, mère de cet empereur.
Un temple du même genre apparaît sur les
monnaies de Byblos et cette ville frappa sous Macrin,
successeur de Caracalla, une monnaie célèbre
représentant un temple entourant un bétyle
ou un obélisque sacré. Mais dans ces
faubourgs urbains, les blocs taillés et les
tambours de colonne étaient trop utilisés
pour rester inemployés. Des Byzantins aux Ottomans
les vestiges et matériaux des temples, spécialement
les blocs taillés et bien équarris,
furent utilisés dans les constructions. Un
examen même rapide des fortifications du Moyen
Age le long de la côte - à Byblos par
exemple - révèle l’extension des
pillages effectués aux dépens des édifices
romains : montants de porte, linteaux, architraves,
même des autels et des stèles inscrites
se voient dans les assises inférieures du château
et dans les murs de l’église (Pl. 103).
Enfin, il nous faut expliquer l’uniformité
du plan, du style et de la décoration dans
les temples du Liban. Une période de deux cent
cinquante ans - en gros, de l’accession d’Auguste
à l’Empire jusqu'à la mort de
Philippe l’Arabe - renferme la fondation et
l’achèvement de tous les temples du liban.
Malgré la durée de cette période,
ces temples ne montrent aucune variante importante.
La forme de l’adyton, par exemple, reste invariable
: une volée d’escaliers conduit à
une plate-forme surélevée où
l’effigie divine se trouvait surmontée
d’un baldaquin ou encadrée dans une niche.
(Le petit temple d’Atargatis à Qalaat
Fakra (Pl. 95) fait exception. Dans ce temple les
sols de l’adyton et de la cella sont au même
niveau. Une inscription date le temple avec une assez
grande certitude de la fin du premier siècle,
mais le but des banquettes dans l’adyton, et
des niches qui se trouvent au-dessous d’elles,
n’a pas encore pu être expliqué.)
Il n’y a pas au Liban d’adyton absidial
comme à Rakhlé, sur le versant syrien
de l’Hermon. Il n’y a pas non plus d’adyton
en forme de niche quadrangulaire comme au temple de
Bêl à Palmyre. Pour expliquer une aussi
grande uniformité, on pense spontanément
à un unique maître d’œuvres,
constructeur de temples, une sorte de ministre des
grands travaux, comme on l’a suggère,
en contact avec l’office du plan urbain et avec
celui des constructions nationales dans la province
de Rome. Que cette hypothèse soit exacte ou
non, les temples romains du Liban constituent un témoignage
grandiose de l’influence unificatrice de Rome.
Ils fournissent des matériaux inépuisables
et passionnants pour l’historien, l’archéologue,
l’architecte, l’astronome, et aussi pour
la mesquine curiosité du touriste.
Carte
des emplacements romains de temple du Liban
basés sur la carte 'Romische Tempel' Syria
L'arrêté
du 17/1/1924 N.2385 modifié par la loi N.75
du 3/4/1999 (Articles 2,5,15,49 et 85) stipule:
L'auteur d'une oeuvre littéraire ou artistique
détient du seul fait de sa création
un droit de propriété absolue sur cette
oeuvre, sans obligation de procédures formelles.
L'auteur de l'oeuvre bénéficiera lui-même
de l'exploitation de son oeuvre, il possède
le droit exclusif de la publier, et de la reproduire
sous quelques formes que ce soit. Qu'il s'agisse ou
non d'oeuvres tombées dans le domaine public,
seront punis d'un emprisonnement d'un mois à
trois ans et d'une amende de cinq millions à
cinquante millions de livres libanaises ou à
l'une des deux peines seulement, ceux qui: 1-auront
apposé ou fait apposé fraudulement un
nom usurpé sur une oeuvre littéraire
ou artistique; 2-auront, pour tromper l'acheteur,
frauduleusement imité la signature ou le signe
adopté par un auteur; 3-auront contrefait une
oeuvre littéraire ou artistique; 4-auront sciement
vendu, recelé, mis en vente ou en circulation
l'oeuvre contrefaite ou signée d'un faux nom.
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