Il y a moins de cent ans, la région Sud-ouest
de Beyrouth était presque désertique,
sablonneuse et vide d'habitants. Un quartier entouré
au Nord par la rue Bliss et l'Université Américaine,
au Sud les Sanayeh (Arts et Métiers), à
l'Ouest par le phare et la mer. Le quartier Hamra
commence à l'Est à une centaine de mètres
de Borj el Murr et la rue Kantari.
Cette zone a-t-elle pris son nom du sable rougeâtre?
des dunes qui avançaient depuis l'Ouzai vers
l'est et que sous le régime des "Moutassarefs"
(les administrateurs) une grande partie fut boisée
de pins afin d'arrêter l'avancée des
sables vers les régions Est? D'ailleurs les
noms de couleurs sont nombreux: Hamra, Saouda, Safra
etc… ou bien des attributs tels que Deir el Ahmar
(le Couvent rouge), Place Rouge, Kornet el Sawda,
Kornet el Hamra etc… ou bien des relations, de fictifs
jumelages avec Al Hambra de Grenades, ce palais luxueux
des mille et une nuits, aux jardins féeriques?
Et cette couleur rouge qui incite au faste, à
la richesse, à Byzance, au feu?
Hamra Street ou Rue Hamra, de son vrai nom de Cadastre
est le 31 (la rue 31) devenue entre 1960 et 1975 le
plus grand centre d'attraction commerciales et d'activités
culturelles, le lieu de rencontre des intellectuels
et des artistes, le centre de la presse, des plus
grands journaux et revues du Liban, des maisons d'éditions,
etc.
J'ai connu cette région aux débuts des
années cinquante, quand elle commença
à devenir animée. Il y avait l'Eglise
Notre Dame du Rosaire, le couvent-école des
Pères Capucins et tout près, la Résidence
du Président Emile Eddé faisant suite
à l'hôpital el Sanayeh et l'école
des Arts et Métiers.
Le signal d'alarme était donné, et le
miracle aussi: c'est un autre Beyrouth qui a vu le
jour des deux cotés de l'axe routier percé
à Hamra.
Je me souviens que nous marchions dans le sable depuis
Hamra jusqu'à l'endroit où fut érigé
le Ministère de l'Education Nationale et le
Palais de l'Unesco; il y avait à peine quelques
vielles maisons ça et là, une boutique,
quelques arbres : figuiers, oliviers, orangers sauvages
(Bigaradiers) et surtout des cactus, peu d'eau, point
d'irrigation et pas d'infrastructure.
Du jour au lendemain, ce fut un nouveau premier matin
de la création, la rue Hamra gagna en célébrité,
elle devint un important et LE centre de Beyrouth
la Capitale.
Hamra s'est rapidement développé : de
grands centres commerciaux, touristiques, sportifs,
culturels… des salles de spectacles, les plus grandes
salles de cinéma de Beyrouth, des sociétés,
des banques dont la Banque Centrale, des restaurants,
des cafés trottoirs, des boîtes de nuits,
de grands Hôtels, des agences d'information
et de presse, des journaux, de grandes librairies,
des ministères, des bureaux d'études,
des galeries d'Art, des cliniques luxueuses, des hôpitaux,
de grands magasins et à ses environs, universités,
facultés, écoles…
La rue Hamra devint un point de repaire et de rencontres,
elle était animée jour et nuit, éclairage,
néon, publicités… On la comparait aux
Champs Elysées et aux centres des capitales
Européennes.
Puis vinrent les événements, si tristes,
que le Liban a connus… et Hamra se transforma, elle
n'était plus la première; la rue Verdun
pris la relève "côté Ouest"
et Kaslik, Monot, Gemayzé, Badaro, Ashrafieh
s'emparèrent du "côté Est"…
Hamra a vécu son âge d'or entre 1960
et 1975, ce fut un printemps éphémère…
C'est une zone assez petite qu'on peut traverser à
pieds pour rejoindre l'Université Américaine,
l'Hôpital Américain, ou les ministères
de l'Information et du Tourisme, ou traverser tout
Hamra en quelques minutes.
Aujourd'hui, Hamra est un ensemble de toutes les communautés
religieuses du Liban, jadis c'était une zone
entièrement Chrétienne.
La région "reprend du poil de la bête"
: les activités redémarrent, animations
et fréquentation reprennent, des expositions
sont à nouveau organisées. Les visiteurs
et amateurs sont très nombreux, des festivals
ont repris, organisés par les ministères
et les sociétés afin de redonner la
vie et le souffle à cette rue.
Le festival d'automne est chaque année patronné
par le Premier Ministre pour montrer les diversités
culturelles et artistiques du Liban… Cela englobe
un grand nombre d'activités avec une large
participation : un grand nombre de musiciens y participent,
le carnaval parade, chars de fleurs, danses, Zaffé,
différents orchestres de Beyrouth, les pompiers,
la Croix Rouge, camions citernes, ânes, chars
de légumes etc…
Des concerts, donnés par des professionnels
: Rock, Blues, Jazz, RAP, Electro, oriental… des stands
d'arts et métiers, des bijoux, des T-shirts
imprimés etc…
Photographes, peintres, céramistes etc… des
cinéastes.. avec leurs œuvres.. des projections
et courts métrages, des concours sont mis en
place pour les meilleurs, une journée à
Hamra sans voiture, pour piéton seulement…
Une ruelle au Liban ne mourra pas et une rue aussi
importante qu'une avenue non plus. Hamra restera toujours
vivante, un centre d'accueil pour toute la jeunesse
et l'avant-garde.
Joseph Matar
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