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Des Dieux et des Hommes - Ibrahim Tabet 07/2015 |
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Je suis le commencement et la fin de tous les êtres Et dans les vivants je suis la conscience.Entre ceux qui ont descendance je suis l'amour Entre les fleuves je suis le Gange. Je suis le temps impérissable, la beauté, la gloire... Et je suis la mort de tout, et je suis la naissance de tout »
Vers de la Baghavat Gita
« Tout homme va à Dieu à travers ses propres dieux »
Gandhi
Face aux mystères de l'univers, les hommes, ne pouvant se livrer qu'à des conjectures sur ce qui est au-delà de leur savoir, inventèrent les dieux. Seules instances à avoir répondu durant des millénaires à la question du sens et à l'angoisse de la mort, les religions exercent une fonction à la fois spirituelle (lien entre le sacré et le profane) et sociale (lien entre les hommes). Faisant miroiter une promesse de vie éternelle dans l'au-delà, elles sont aussi orientées vers l'ici-bas. Accomplir des rites conformes aux commandements de la religion ayant pour fonction de produire des résultats espérés en termes de santé, de prospérité, de bonheur ou de victoire. Non contente de vouloir régenter les consciences, la théologie a également prétendu pendant des siècles se mêler de cosmologie avant de consentir à laisser ce domaine de compétence à la science et à se limiter à la question du salut.
Au cours de la préhistoire est apparue une forme primitive de religiosité sacralisant la nature. Les rituels pratiqués par les chamanes avaient pour fonction de communiquer avec ses forces invisibles et les rituels de la mort à l'idée qu'il existait une vie dans l'au-delà. Apparut également le culte des esprits ancêtres. Il ne s'agissait cependant pas encore de spiritualité, mais d'une sorte de panthéisme. Les premières représentations de divinités apparurent il y a seulement dix mille ans à l'aube du néolithique avec la sédentarisation et la naissance des cités. Aux rituels de la transe chamanique succédèrent les prières des prêtres. Les esprits du tonnerre, des orages et de la pluie furent convertis en divinités sexuées. Et la croyance que l'âme ne peut accéder à la vie éternelle sans son enveloppe charnelle entraîna la momification des corps des pharaons dans l'Égypte ancienne. Les déesses mères, symboles de fécondité et de fertilité, précédèrent les dieux, mais ces derniers finirent par les supplanter avec la constitution de sociétés patriarcales. Les rituels sacrificiels, qui avaient pour fonction de bénéficier de leur protection et de leurs bienfaits ou de conjurer leurs courroux firent l'objet d'une surenchère débouchant sur les sacrifices humains. Les divinités égyptiennes primitives zoomorphes ont laissé la place aux dieux anthropomorphes grecs, dotés des mêmes passions et des mêmes travers que les humains. Croyances critiquées par les philosophes : Socrate qui sera condamné à mort pour impiété ; Platon et Aristote qui ont forgé par la raison la conception d'un être premier, absolu et bon, qui ressemblait fort au Dieu de la révélation biblique et coranique. Comme tous les grands sages de l'Antiquité, ils considéraient le polythéisme comme la religion du peuple. Pour eux, la multiplicité des dieux ne faisait que symboliser les forces cosmiques émanant d'un être suprême dont ils croyaient à l'unicité, mais en réservaient l'enseignement à un cercle étroit d'initiés. Cet être suprême était appelé « âme du monde » par la théosophie et Brahma par l'hindouisme.
Chaque cité, chaque État avaient leurs dieux que l'on invoquait en temps de paix ou de guerre. La victoire d'une communauté était aussi la victoire de son propre dieu sur le dieu étranger, du dieu le plus fort sur le dieu le plus faible. Aucun État conquérant ne nourrissait toutefois la prétention de convertir, de gré ou de force, à ses dieux, les peuples qu'il subjuguait. Témoignant du syncrétisme de l'Antiquité, Rome édifia même un Panthéon abritant tous les dieux des peuples conquis. Avec la constitution de grands États succédant aux cités-États apparut une hiérarchisation des dieux, puis l'idée de l'existence d'une divinité suprême, mais non exclusive, faisant l'objet d'un culte qualifié de monolâtrie, étape intermédiaire entre le polythéisme et le monothéisme. C'est les cas de Zeus, trônant au sommet de l'Olympe. D'Amon-Ré auquel s'identifiaient les pharaons, à la fois souverains absolus et prêtres suprêmes de l'Égypte antique, garants de l'ordre du monde. À Rome, les empereurs étaient, eux aussi, divinisés et le culte impérial était mis au service de l'intégration des peuples de l'empire.
Les grandes religions de l'Antiquité avaient une conception trinitaire de la divinité qui sera reprise par le christianisme. Pour la théosophie ou sagesse des dieux, le microcosme est par sa composition ternaire, à l'image du macrocosme, monde divin, humain et naturel, qui est lui-même l'organe ineffable de Dieu, lequel est père, mère et fils, essence, substance et vie. À Osiris, Isis et Horus chez les Égyptiens, correspondaient Zeus, Déméter et Apollon chez les Grecs, Brahma, Shiva et Vishnou chez les Hindous. Incarnation de l'éternelle énergie cosmique, Shiva tient dans sa main gauche supérieure une langue de feu, et dans sa main droite supérieure le tambourin, représentant la musique, symbole de l'harmonie des lois de la nature. À l'origine est le règne absolu de la flamme. Le feu s'abaisse. La matière s'éveille et s'organise. La flamme fait place à la musique. Les gestes des autres mains traduisent l'équilibre de la vie et de la mort dans le cycle des réincarnations à l'issue duquel les âmes sont destinées à fusionner avec le Brahma suprême.
Représentée par le disque solaire, source de vie, la première idée d'un Dieu unique et exclusif formulée par Akhenaton ne lui survécut pas. Puis, au bout d'une longue maturation, une partie de l'humanité s'est ralliée à l'idée, élaborée par une succession de prophètes inspirés, d'un seul Dieu, à la fois transcendant, omnipotent, omniscient, créateur de toute chose et éthique. C'est le cas des adeptes des trois religions du livre : juifs, chrétiens et musulmans. Toutes les trois croient à l'immortalité de l'âme et font dépendre le salut dans l'au-delà de la conduite ici-bas. Elles croient aussi à l'existence de l'enfer et du paradis dont on ne sait s'il se situe au « ciel » ou dans l'une des milliards de galaxies peuplant notre univers.
Les premiers à se rallier à cette conception du monothéisme furent les Hébreux. Fruit d'une longue évolution, elle ne s'imposa définitivement qu'au VIe siècle avant notre ère, contrairement à l'assertion de la Bible qui la fait remonter à Abraham. C'est à la même époque que s'imposa en Perse un autre monothéisme, le zoroastrisme, adorant un Dieu unique et éthique, Ahura Mazda, qui, comme le Dieu de l'Ancien Testament, protège les fidèles et punit les pécheurs. Abraham ainsi que Moïse sont probablement des personnages légendaires dont l'historicité n'est pas prouvée. Aucun texte égyptien ne mentionne d'ailleurs l'existence de ce dernier, ni la réalité du récit de l'exode. La Bible est un mélange de récits de portées symboliques, comme celui d'Adam et Ève, d'événements historiques plus ou moins avérés, de mythes empruntés notamment à la culture mésopotamienne, comme celui du déluge, ou de Moïse sauvé des eaux. Elle est également destinée à légitimer les notions de peuple élu et de terre promise, ce qui explique la lecture littérale qu'en font les juifs orthodoxes. C'est le cas aussi des protestants fondamentalistes américains qui, rejetant toute critique rationnelle de la Bible, nient la théorie évolutionniste de Darwin et défendent la thèse du créationnisme affirmant la création directe de l'humanité par Dieu.
Le Dieu de l'Ancien Testament était un Dieu jaloux et guerrier. Dans la Torah, Yahvé donne souvent à Israël l'ordre de partir en guerre contre les autres nations. « Tu démoliras leurs autels, tu briseras leurs stèles, tu brûleras leurs idoles, tu ne laisseras pas subsister aucun être vivant dans les villes que le Seigneur ton Dieu te donne en héritage », proclame le Deutéronome. Moïse et ses successeurs ne se privèrent pas d'ordonner des massacres au nom de Dieu. Ce n'est qu'après le retour de l'exil à Babylone que les prophètes tardifs développèrent une littérature de sagesse traduisant un questionnement spirituel et brossant dans les psaumes l'image d'un Dieu aimant et compatissant, proche du cœur des fidèles. Et le livre de Job tenta de concilier la coexistence du mal et de Dieu.
Les monothéismes chrétien et musulman (2) OLJ 24/07/2015
Décevant l'attente des Hébreux, Jésus se présenta comme un Messie purement spirituel dont le royaume n'est pas de ce monde. Il fera du Dieu d'Israël un Dieu d'amour. Mais il n'a pas voulu abroger la loi juive. C'est l'apôtre Paul qui a fondé une nouvelle religion de salut universel distincte du judaïsme. À l'ancienne alliance entre Dieu et le peuple élu succède une nouvelle alliance entre Dieu et l'ensemble de l'humanité fondée sur la foi en la divinité du Christ affirmée par les Évangiles. À la différence des Évangiles synoptiques de Luc, Matthieu, et Marc, c'est surtout le cas de celui, plus tardif, de saint Jean, le seul où sa divinité est explicitement mise dans la bouche de Jésus, et qui en fait l'incarnation du logos divin. Il se peut que le récit de sa vie, tel que relaté dans les Évangiles canoniques, rédigés bien après sa mort, soit en partie mythique. Et des miracles comme la résurrection de Lazare ont peut être été inventés pour les besoins de la cause. Mais cela n'enlève rien au fait qu'aucun prophète, y compris Bouddha, n'ait enseigné des principes moraux et éthiques aussi élevés et aussi ambitieux.
De la croyance que Jésus est fils de Dieu on passa à la croyance qu'il est Dieu fait homme, puis au mystère de la Trinité. Les dogmes fondateurs de la doctrine chrétienne n'ont été élaborés par les quatre conciles œcuméniques (Nicée, Constantinople, Éphèse et Chalcédoine) qu'à la suite de longues controverses trinitaires et christologiques. Il a fallu trois siècles à l'Église pour proclamer le dogme de la Trinité et pour résoudre la question des relations entre Jésus-Christ et Dieu le Père. Est-il Dieu comme lui et ayant la même substance ? Ou un être divin créé par lui et subordonné à lui, comme le professait l'arianisme ? Dans la relation au Saint Esprit, la mention « filioque » a été, et demeure toujours, un sujet de controverse entre l'Église catholique et l'Église orthodoxe. La question étant : de qui procède le Saint Esprit, du Père seulement ou du Père et du Fils ? Quant aux querelles christologiques elles portaient sur la coexistence en Jésus de l'humain et du divin. Au Ve siècle l'hérésie nestorienne qui veut distinguer en lui l'homme et le fils de Dieu, ainsi que le monophysisme pour qui le Messie a une seule nature, divine, ont fait l'objet d'une double condamnation derrière laquelle se profilaient des oppositions politiques et culturelles entre Constantinople et Alexandrie, Grecs et Sémites orientaux. Jusqu'à la Renaissance il ne fut pas permis à l'homme occidental d'avoir d'autre pensée que la pensée chrétienne. Pour saint Augustin tout s'explique par l'influence du créateur. L'autorité de l'Écriture est supérieure à tous les efforts de l'intelligence humaine. Il ne faut donc pas chercher à comprendre l'Univers et à étudier le monde sensible. La foi suffit.
L'idée d'un Dieu unique ne pouvait qu'entrer en collision avec le polythéisme antique et le syncrétisme de la société romano-hellénique. Ce fut surtout le cas du Dieu universel des chrétiens qui, contrairement au Dieu national juif, est porteur d'un projet eschatologique qui doit sauver l'humanité entière. La conversion de Constantin, puis la proclamation du christianisme comme religion d'État par Théodose marquent le début de ce que Arnold Toynbee a qualifié de « plus grand désastre qui soit arrivée à la chrétienté : l'immixtion de César dans les affaires de Dieu, et de l'Église de Dieu dans les affaires de César ». À partir de ce moment, toute atteinte à l'Église devient une trahison envers l'État. Bien que le Christ ait prêché une religion d'amour, le christianisme institutionnalisé contribua à légitimer la violence la plus brutale. De persécutée au nom du Christ l'Église devint persécutrice en son nom. Contrairement à l'enseignement du Christ, elle a prétendu imposer la primauté du pouvoir spirituel sur le pouvoir temporel. Et, en contradiction avec le message évangélique de pauvreté, les papes de la Renaissance furent aussi des chefs politiques et de guerre, avides de pouvoir et de richesses matérielles. Abus à l'origine de la Réforme protestante qui prône une émancipation du pouvoir des clercs et de la papauté pour revenir aux principes de l'évangile. Puis de la contre-réforme qui enclencha un processus conduisant l'Église catholique à se concentrer finalement, sous la pression des pouvoirs séculiers, et non sans résistance, à sa mission spirituelle, morale et sociale ; et, depuis le concile Vatican II, à se prononcer pour un dialogue avec les autres religions, au grand dam des catholiques intégristes, disciple de Mgr Lefebvre.
Dernière née des religions monothéiste l'islam est revenu à l'unicité de Dieu proclamée par le judaïsme. Un Dieu transcendantal, invisible, clément et miséricordieux. Mahomet fut à la fois un prophète, un législateur, un fondateur d'État et un chef militaire. Se présentant comme envoyé de Dieu, il ne voulait pas d'abord créer une religion nouvelle mais revenir à la foi originelle d'Abraham. Se proclamant comme le sceau des prophètes, il ne prônait pas une rupture avec le judaïsme et le christianisme, dont il respectait les livres saints, mais déclarait vouloir leur accomplissement et leur dépassement. Celui du monothéisme bancal du christianisme qui scinde Dieu en trois entités, et celui de la notion judaïque de peuple élu, remplacée par une religion universelle. Mais les réticences des chrétiens et l'opposition des juifs poussèrent le Prophète à prendre ses distances avec eux. Pour marquer cette rupture, il invite ses fidèles à ne plus prier vers Jérusalem mais désormais vers La Mecque. Alors qu'à La Mecque sa prédication revêtait un caractère religieux et liturgique, et donnait en exemple aux croyants la miséricorde divine à partir de l'hégire les sourates médinoises prirent une orientation nettement politique, sociétale et législative. Le Coran compte plusieurs versets qui exaltent la guerre sainte, le jihad, même si certains d'entre eux ont été interprétés comme des incitations à l'effort sur soi-même. Et l'islam se propagea par la conquête tout en ne cherchant pas à convertir de force les peuples soumis à sa domination, conformément à un verset qui déclare : « Pas de contrainte en religion. » À la différence du catholicisme confronté au défi du protestantisme et qui a accompli son aggiornamento, l'islam sunnite n'est pas parvenu à se réformer. La croyance que le Coran est la parole incréée de Dieu constitue un obstacle à son exégèse, malgré les efforts d'interprétation (ijtihad) du hanafisme, la plus libérale et la plus souple des quatre écoles juridiques sunnites. Faisant preuve d'un plus grand esprit d'ouverture, les clercs chiites élaborèrent tout un corpus doctrinal destiné à donner une réponse aux défis du monde moderne. À la différence des musulmans, les druzes professent une religion syncrétique qui vénère sept incarnations de leur divinité, parmi lesquelles figurent Pythagore, Moïse, le Christ, Mahomet et le calife fatimide al-Hakim, inspirateur de leur religion au Xe siècle.
Les religions peuvent inspirer le meilleur comme le pire : des saints et des soufis mystiques, comme des soldats autoproclamés de Dieu perpétrant des atrocités en son nom. La croyance en un Dieu unique et universel engendre la croyance en une vérité unique et universelle et, de là à vouloir l'imposer au monde entier, le pas est vite franchi. L'histoire des religions monothéistes est entachée de multiples exemples d'intolérance et de fanatisme. Alors que l'Empire romain païen avait réussi à intégrer les peuples conquis en admettant tous leurs dieux dans son panthéon, le monothéisme des chrétiens, des musulmans et des juifs est devenu une source d'exclusion et « d'identités meurtrières ». Censées favoriser la paix, les religions sont pourtant devenues l'un des leviers de guerre les plus puissants. De ce point de vue les musulmans sont d'avantage en accord avec l'enseignement et l'exemple de Mahomet qui fut aussi un chef politique et de guerre que les chrétiens avec celui du Christ qui se fit l'apôtre de la non-violence. Cela dit l'évolution de la chrétienté et de l'islam en matière de tolérance s'est faite en sens inverse. Et alors qu'aujourd'hui ce dernier est le théâtre d'une recrudescence d'intolérance, cela a été longtemps le cas de la chrétienté
En raison de l'absence de dogmes, les croyances indiennes, chinoises et japonaises ne sont pas exclusives comme les religions monothéistes. Elles admettent la pluralité des voies pour atteindre la libération. En Chine, une même personne peut être à la fois bouddhiste, taoïste et confucéenne, et au Japon se marier selon le rite shintoïste et avoir des funérailles bouddhistes. En outre l'idée d'un Dieu personnel est absente des sagesses asiatiques. Pour Bouddha, c'est perdre son temps que de spéculer vainement sur les questions métaphysiques, l'existence ou non d'un être suprême étant inaccessible à la raison et à l'expérience.
La position de la pensée occidentale est différente. Nombre de philosophes et de scientifiques, même athées ou agnostiques, estiment qu'il existe probablement une intelligence suprême derrière la création. Pour eux l'évolution de l'univers, ainsi que la montée de la complexité qui a finalement accouché de la conscience, ne saurait être uniquement le fruit du hasard. C'était déjà l'opinion de Voltaire qui, critiquant le théisme « inventé par les prêtres », prônait un déisme postulant l'existence d'un Grand-Horloger s'apparentant au Grand-Architecte de l'univers des francs-maçons. Dans sa lutte pour instaurer une « religion de la raison », la philosophie des Lumières, considérait la religion comme une superstition dépassée, du moins en Europe, qui aurait atteint « l'âge adulte de l'humanité », selon l'expression de Kant. C'est aussi la thèse d'Auguste Comte auteur de la loi des trois états selon laquelle l'esprit humain passe successivement par « l'âge théologique », et par « l'âge métaphysique », pour aboutir enfin à « l'âge positif ». Et Max Weber a fait de l'histoire de l'Occident moderne celle du « désenchantement du monde », de la sortie du monde magique de la religion. Il souligne l'importance du processus de rationalisation caractérisé par l'effacement de la croyance irrationnelle dans l'action de Dieu dans le monde.
Il n'y a que dans une Europe occidentale largement déchristianisée où la religion ne fonde plus le lien collectif et où le sens du sacré s'est largement perdu. Depuis le dernier quart du XXe siècle le monde est le théâtre d'un « retour du religieux », aussi soudain que généralisé. Phénomène qui semble donner raison à Malraux qui prophétisait : « Le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas », contre Nietzche qui avait prononcé la mort de Dieu. Sauf que cette « revanche de Dieu », selon l'expression de Gilles Kepel, reflète moins un regain de foi qu'une quête d'identité en réaction au « désenchantement du monde » et un recours à la religion à des fins politiques. Et, s'il touche toutes les religions et tous les continents, c'est surtout au sein de l'islam qu'il se manifeste de la manière la plus radicale et la plus violente. Avec le risque que ne se rallume l'antagonisme millénaire entre l'islam et la chrétienté et ne se réalise une autre prophétie : celle du choc des civilisations.
Ibrahim TABET
L'EXPRESSION DE LA LIBRE ANALYSE
CORRECTION : VERS QUATRIÈME LIRE LA GENÈSE. MERCI. M.V.
L'homme depuis la nuit des temps...a fabriqué beaucoup de dieux....Je préfère les dieux païens , ils sont plus nombreux ...il y a donc plus de choix...
L'EXPRESSION DE LA LIBRE ANALYSE
MAIS DIEU A COMMIS UNE ERREUR : IL A CRÉÉ L'HOMME !
RÊVE D'IMMORTALITÉ
LORSQUE DANS SON DÉLIRE, AU PARADIS D'EDEN,
DANS UN INSTANT FATAL, IL CRÉE LA RACE HUMAINE,
DE SON OEUVRE, ÉCOEURÉ, DIEU, S'ÉCRIANT : AMEN !
LE GENÈSE DE L'HOMME EST, DIT-IL, LA GÉHENNE !
INSECTE IMMONDE ET VIL, GERME ISSU DU NÉANT,
CE BÂTARD PRÉTENDRAIT À LA TIARE DIVINE,
ET LES CIEUX, RÉVOLTÉS, DE CE FILS MÉCRÉANT
RÉCLAMERAIENT LA MORT. MAIS L'HOMME SE MUTINE !
IL PENSE ! IL S'ENHARDIT ! IL S'ACCROCHE À SON RÊVE !
DÉFIANT SON CRÉATEUR, IL PARLE D'ÉQUITÉ !
IL OSE ASPIRER MÊME À L'IMMORTALITÉ !
PUIS, DRESSANT DES AUTELS, DES PIÉDESTAUX, DES CIMES,
VERS DES TEMPLES MAUDITS IL TRAÎNE SES VICTIMES,
ET DE LEUR SANG VERMEIL QUI COULE, AMÈRE SÈVE,
IL S'ABREUVE ET S'ENIVRE ! IL DÉLIRE ET IL RÊVE !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN Mais quelle fantasmagorie et quelles bêtises, toutes ces religions et tous ces monothéismes !
Réaction au deuxième tome
L'EXPRESSION DE LA LIBRE ANALYSE
L'UN C'EST LE FRUIT DE LA PAROLE... ET L'AUTRE CELUI DE L'ÉPÉE !
M.V.
Le choc ou la guerre des civilisations ...n'est après tout ...qu'une résurgence tardive de la conquête islamique ...à travers les mouvements religieux obscurantistes , imposant par la force les préceptes de la charia surtout aux peuples des religions préislamiques...et aux diverses obédiences musulmanes ...mais il sera impossible pour ces médiévaux ,de faire oublier au monde 6000 ans de l'histoire des civilisations....
Réponse DIEU ET LA GUERRE
Nous avions eu ; « l’impérialisme porte la guerre comme la nuée, la pluie », « les armées permanentes poussent à la guerre », « le commerce, l’industrie incitent à l’agression ; guerre du pétrole, des matières premières etc. etc. ». Actuellement nous aurions la guerre à cause de Dieu et plus particulièrement du monothéisme abrahamique.
Face aux mystères de l’Univers qui l’environnent l’homme naturellement s’interroge. Puis il réfléchit sur lui-même. Il doit prendre conscience de son mystère ontologique. Notre propre être est un mystère à nous même. « Invente-t-il les Dieux » pour autant ? Ce n’est pas avec l’utilisation d’un outillage rudimentaire ; la massue et le bâton que l’homo habilis devient profondément homme. Ce n’est pas, non plus avec la pierre polie, avec plus ou moins de finesse. C’est par la première tombe intentionnelle qu’il est sapien-sapien. Un être cher plein de vie devient soudain matière inerte. Encore quelques jours son odeur est même nauséabonde ; voilà le miroir de notre réflexion vers la divinité. Tout s’arrêt-t-il là ?
Quant à la guerre, il faut le dire et le reconnaître, elle fait partie de l’ordre de la nature humaine, avec ou sans religion. Notre monde est une lutte permanente. Plus ou moins violente ou sournoise, à basse ou haute intensité, elle est le tissue de notre existence. Nous la rencontrons, depuis les forces telluriques aveugles de la lave du volcan recouvrant sans bruit de verdoyantes prairies tropicales, jusqu’aux micros organismes s’entredévorant. Tout le monde se bat contre tout le monde, de différentes façons. En quoi l’homme devrait-il en différer ? Soudain, parfois, même les cellules de notre corps se dérèglent, se développent douloureusement au point de nous faire périr. Les puissants voudront toujours dominer, les petits grandir, les jeunes s’accroître, prendre toute leur place, et les vieux persister, survivre. Celui qui s’abandonne sera abandonné. Toute faute d’inattention se paie au prix fort. Cela au niveau des personnes comme des nations. Parfois certes, il y a des sortes de trêves, sur un domaine ; les forces s’équilibrent. Nous pensons que la paix universelle s’annonce. Mais, en dehors de notre vigilance. dans d’autres secteurs l’affrontement se poursuit. Il y a bien des gestes gratuits mais cela est vu presque comme une anomalie dangereuse.
Le concept Dieu d’ailleurs a du mal à se saisir. Surtout s’il est Unique. Une perfection absolue n’a nul besoin de quelque création soit-elle. Le cercle en tant que circonférence a-t-il besoin d’un triangle ou d’un carré ? Acceptons la création divine ! Malédiction ! Celle-ci n’est pas parfaite ; le mal gît dans son sein. Néanmoins …. un visage, quelques notes de musique, des formules mathématiques ordonnées, l’air frais du matin, le levé du soleil, nous indique une harmonie supérieure. Je ne sais pas pourquoi ce sont les instants de bonheur qui me font croire en Dieu. Les dissonances ne peuvent pas venir de lui. D’ailleurs, un certains nombres de théogonies de la Mésopotamie partent d’un principe binaire comme le Manichéisme, l’opposition de deux frères Ohrmazd/Ahriman ou la lutte entre Saint Michel et Lucifer
Bien souvent les Romains sont vus comme un exemple par rapport à la tolérance religieuse mais question guerre on ne peut pas dire qu’ils en furent avares. Même nous y rencontrons des guerres inexpiables. Au centre de la ville éternelle s’affirme le Colisée ; pour fêter la victoire sur les Daces, l’optimus Trajan offrit quinze jours de festivités avec le combat à mort d’environ quarante milles prisonniers. Il devait y régner une étrange odeur vous poussant à estiver vers une villa du Latium. Dans le «sombre » Moyen-Âge, la société farouchement chrétienne codifia le duel pouvant aller jusqu’au tournoi. Quels changements par rapport à la vendetta naturelle d’une société ensauvagée. Après la cruelle Guerre de Trente Ans au XVII siècle les États chrétiens monarchiques pratiquèrent la Guerre en Dentelles du XVIII siècle. Ce fut les armées révolutionnaires françaises, pilleuses de monastères et autres trésors religieux, qui remirent à l’honneur la guerre à outrance. Ce sont eux les « féroces soldats » et non les régiments emperruqués du Duc de Brunswick lors de la bataille de Valmy. Cent ans plus tard l’Armée Rouge athée relança la férocité de l’action de la guerre révolutionnaire.
L’historien des religions Georges Dumézil (1896-1966) contribua à une étude scientifique de celles-ci avec en particulier la fameuse tri fonctionnalité dans la société indo européenne ; ceux qui prient : l’ordre sacerdotal, ceux qui combattent ; la noblesse et finalement ceux qui travaillent ; le tiers-état. Faut-il faire de la religion une base uniquement sociologique ? Le thaumaturge du village ne fait-il pas partie du premier ordre ? Le paysan d’esprit combatif devenant un fin stratège rejoint le second ordre. Le noble vivant dans son château de ses terres devrait rejoindre le tiers-état. Il est vrai que nous pouvons deviner dans chaque société humaine ces trois fonctions qui pourraient d’ailleurs se subdiviser selon un ordre hiérarchique. Je reconnais volontiers que certaines personnes possèdent des qualités éminentes dans tel ou tel domaine. C’est frappant dans le commerce comme dans les mathématiques par exemple.
Justement dans le sacerdoce ne sentons-nous pas certaines personnes, élues par la Providence, plus proches d’un autre monde que le nôtre ? L’une des premières demandes que nous leur faisons habituellement, c’est de nous informer sur nos êtres chers partis avant nous. Il serait un peu fallacieux et restrictif d’imaginer le sacerdoce se jouant uniquement de la naïveté du bon peuple écrasé par la terreur de l’au-delà. Sûrement qu’il y eût dans les promesses du paradis une sorte de miroir aux alouettes ; il suffit de rappeler les fameuses indulgences qui déclenchèrent la crise de conscience luthérienne.
Tout pouvoir a tendance à vouloir tout régir. Sous nos yeux ne voyons-nous pas l’économique s’imposer comme l’alpha et l’oméga de toute société ? Nous serons tous des entrepreneurs. Tout devient marchandise. Est-ce possible ?
Il y a naguère la fonction militaire, par la guerre totale, voulait et régissait toute vie dans un pays mobilisé. Elle demandait jusqu’au sacrifice suprême de la fleur de sa jeunesse. La conscription faisait de tout jeune homme un soldat. N’était-ce pas un abus ; tout le monde ne peut pas être expert dans les emplois de Mars.
Il fut un temps où chaque moment de la vie se faisait au rythme des carillons des heures canoniques. D’un angélus à l’autre dans un cadre champêtre, c’est ainsi que nous vivions. Dans les paraboles dominicales nous retrouvions notre cadre de vie. Nous pouvons excuser que l’Église parfois se fit météorologue à travers les saints. Pourtant contrairement à ce que pense le commun des mortels elle n’obligea pas Galilée à déclarer le contraire de ce qu’il pensait, l’héliocentrisme, mais à le prendre comme hypothèse tant qu’il n’en aurait pas fait la démonstration. Elle vint, bien plus tard en 1729 avec la nutation. Il est regrettable que lui, le premier physicien qui utilisa le pendule, n’eût pas le coup de génie de Léon Foucault en 1851. D’autre part il ne faut pas avoir peur de répéter qu’en 1582 le Pape Grégoire XIII sut réformer le calendrier avec une exactitude extrême. Nous vivons actuellement à son rythme Il fallut attendre un ou deux siècles pour que le monde Protestant se résolve à le suivre.
Cependant avec l’imprimerie et Martin Luther se pose la question ; les hommes ont-ils besoin de l’Église ? Toute personne saine d’esprit, lisant le livre saint peut s’approcher de Dieu autant qu’un prêtre. Pas besoin de latin, il y a d’excellentes traductions. L’important c’est la Foi. Malheureusement, même avant l’imprimerie, quand chacun pouvait ou essayait d’entrer en correspondance avec la divinité bien souvent il y avait divagations. Nous retrouvons cela dans toute religion. Il est heureux que l’Église dans sa grande Tradition sache contrôler les manifestations surnaturelles. Bien souvent la fameuse Inquisition n’était que le garde fou des folies humaines en proie à des phobies. D’ailleurs, il y eût des échecs comme la croisade des enfants. Quitte à me singulariser un peu, sans être clerc, j’apprécie la hiérarchie cléricale. Je constate que les religions qui n’ont pas cette particularité ou alors faiblement, souffrent d’un handicap. L’homme seul, même génial ou saint, doit se relativiser par rapport à ses semblables. Il peut fonder un ordre religieux sans exiger une révolution générale universelle. Plus que la lecture des textes sacrés, l’acte rituel d’adoration est nécessaire. Il est le véritable lien, la religion au sens littéral. Dans la messe certains pensent agir par l’homélie, le sermon. D’autres s’appuient sur le texte, rien que le texte sacré. Il est heureux que le centre de l’Eucharistie soit la Consécration. Cette théurgie peut être vue comme un reste de sorcellerie superstitieuse. Pourtant elle peut se dérouler comme autre chose qui dépasse la logique du discours. Toutefois il faut agir sur le monde par des actes. Une Foi non agissante est-elle une foi sincère ? La construction des cathédrales sont-elles prescrites dans les Évangiles ?
Nous vivons une époque fantastique. Nous serions entrés dans l’ère du Verseau : importance de la musique et de l’air sous son aspect spatial, avènement de l’androgyne. Malraux prophétisait « Le XXI sera religieux ou ne sera pas » ; théoriquement le Verseau est un signe humain. Quand les prophéties se réalisent, elles surprennent le prophète et tous ceux qui espéraient. Écoutez la musique tonitruante que nous distribuent les puissants moyens techniques ! Moi, j’attendais plutôt du Mozart ! Certains nous voyaient colonisant la planète Mars et autres stations spatiales. L’espace s’invite à chacun de nous à l’oreille par téléphone ou à l’œil par le GPS. Pour l’arrivée de l’androgyne il suffit d’évoquer le mariage pour tous. Quant au religieux je le sens venir du côté des Droits de l’Homme, sorte de nouvelle religion universelle.
Alors, les guerres sont-elles plus intense parmi les religions abrahamiques ? Je constate en premier lieu que le Sionisme fut promu par des agnostiques sinon des athées. Ainsi nous avons vu naître l’Israélien. Maintenant certains religieux veulent l’État Juif, cela pose la question de définir le « Juif »…..le vrai Juif. Celui qui respecterait les 360 prescriptions religieuses ? Malheureusement pour le peuple palestinien, rien ne changera ; il y aura toujours la dépossession de sa terre chaque année un peu plus et encore un peu plus.
Pour l’Islam plusieurs sociétés son en constructions. Depuis le pays des purs ; le Pakistan jusqu’à la Malaisie un autre modèle asiatique sans compter l’Arabie Séoudite. Dans le monde arabe, je suis étonné du succès des Émirats-Unis, du Qatar et autre Koweït. Il y a soixante ans la vie était de mœurs rudes, bibliques dans un cadre désertique à peine vivable. Maintenant nous voyons des cités futuristes semblables à la science fiction poser en majesté entre le désert et la mer. C’est fantastique, nous croyons rêver ! Pourtant le plus extraordinaire vient de la vie de la population ; le cadre reste indubitablement islamique. Les habitants naturels sont ultra minoritaires. Néanmoins ils tiennent leur pays. Ils sont parvenus à maintenir pas mal de leurs coutumes malgré le choc du futur imposé par la technologie dominante. L’étranger, l’immigré n’y fait pas la loi. Ces réussites méritent mieux d’être soulignées que les aberrations sanglantes de l’EI venant de vivre sa première année chaotique.
Pour le christianisme, certains trouvent comme un succès la laïcisation des pays européens. La religion étant une opinion purement personnelle. L’individu étant tout, le collectif national ou religieux est vu comme un frein à l’évolution supposé du monde. A cette manière de voir il est impossible de s’opposer sans passer pour un rétrograde populiste pas loin du fascisme. Dans cette vision obligatoire j’y vois plus de dogmatisme que dans les divers synodes épiscopaux bien souvent sur la défensive. A quant le mariage des Prêtres ? Tandis que l’on prône une homosexualité militante, on demande, uniquement au sacerdoce, les plus sévères sanctions contre la pédophilie du siècle dernier, avec dédommagements pécuniaires. L’Église humblement s’exécute.
Si guerre il doit y avoir entre les compétitions des civilisations il ne sera pas nécessaire d’en appeler à Dieu sous formes diverses. Certaines se dissoudront sans trop se rendre compte, ne sachant pas relever les défis envoyés par le Destin. D’autres réagirons par des actes violents, désespérés. Quelques uns éprouveront la nécessité de prendre les armes pensant défendre un type de société mais Dieu sera-t-il revendiqué ? Rien de moins sûr. Tournons un regard vers la Birmanie ou Myanmar ; les Rohingya musulmans affrontent le monde bouddhiste ; il n’y pas d’appel à Dieu. A la limite, je pense que c’est plus une affaire de race. Regardez encore l’Ukraine ; c’est à l’intérieur de la sphère orthodoxe que passe la fracture la plus violente ; avec tanks, canons et missiles. C’est un véritable choc de civilisation. L’Américanisme retrouve là « son destin manifeste » face au Slavisme. Cela se passe quasiment inconsciemment.
Michel Rouvière
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