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Hendiyé et le Patriarcat Maronite par Joseph Sokhn

 

 
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Hendiyé et le Patriarcat Maronite par Joseph Sokhn
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Le rôle que le Liban a joué dans l'histoire, il le doit à sa nature montagneuse et à sa situation géographique.

N'est-il pas un carrefour mondial et un pont entre l'Occident et l'Orient? Ses montagnes majestueuses, profondément ravinées, ont servi d'asile aux minorités et croyances opprimées.

Une religieuse visionnaire, Hendiyé, occupa au cours du XVIIIème siècle la communauté maronite pendant prés de 25 ans. Etait-elle sorcière ou sainte, se demande Cheikh Nassib El-Khazen, originaire du Kesrouan, qui publia une étude assez détaillée à son sujet.

Toutefois, les paroles, les gestes et les attitudes de Hendiyé ainsi que ses pratiques religieuses extravagantes suscitèrent la colère du Vatican alerté à l'époque par les Jésuites, alors que bon nombre de Maronites lui vouèrent respect et estime.

Comment le Patriarcat Maronite réagit-il vis-à-vis de Hendiyé?

Le Patriarche Aouad et tous les évêques de la communauté maronite ainsi que les moines aleppins l'appuyèrent ouvertement.

Originaire d'Alep, Hanni Ajami, fille de Chekri Ajaimi, surnommée Hendiyé, avait pratiqué la dévotion spirituelle dans son milieu natal et même avait été nommée responsable d'une congrégation fondée par les Jésuites (La congrégation du Sacré-Cœur).

Arrivée au Liban en 1748, elle entra au couvent de la Visitation d'Antoura dirigé par les Jésuites. Elle en sortit après un séjour de 9 mois. Grâce à son directeur de conscience et à l'appui de son frère qui était père Jésuite elle réussit à se faire admettre au couvent de Saint-Jean Baptiste de Hrache. Ce couvent, elle le quitta pour acquérir le couvent de Bkerké contre une somme de 3500 piastres.

L'éducation et les gestes de Hendiyé inspirèrent de la méfiance aux personnes avec lesquelles elle se trouva, d'abord, en contact. Sa vie fut une sorte de roman. Elle a connu la gloire et elle fut pour la foule la voyante et la sainte. Mais plus tard, elle a connu, également, la déchéance.

En 1906, Mgr Pierre Chébli et, en 1910, le père Boutros Aouad rédigèrent des études inédites à son sujet.

Dès 1572, le Vatican promit d'étudier avec bienveillance les projets de Hendiyé et de confirmer ses statuts.

Elle avait déjà pris possession de Bkerké et l'évêque Germanos avait obtenu du Patriarche Simon Aouad la permission de fonder avec Hendiyé une congrégation sous le vocable du Sacré-Cœur.

En 1753, le Cardinal (Protocario) protecteur de la Nation Maronite fit savoir que la demande ne pouvait être exécutée.

Cependant, les activités de Hendiyé attirèrent les regards sur Bkerké et sur la congrégation naissante. De nombreuses jeunes filles des meilleures familles du Liban et d'Alep demandèrent a y être admises.

Quant aux Cheikhs Khazen ils ne pouvaient, d'accord avec quelques pères Jésuites, admettre certains miracles qu'on attribuait à Hendiyé. Le père Marc Sicarcan qui avait été envoyé à Rome pour demander la confirmation du Patriarche arménien attira l'attention de la Propagande sur les faits et gestes de Hendiyé. Ainsi, Rome décida-t-elle de mener une vaste enquête sur Hendiyé. Un délégué apostolique allait arriver au Liban pour cela. C'était en avril 1753.

Dès son arrivée au Liban, le délégué apostolique ordonna au Patriarche Simon qui résidait à Machmouché, de transférer Hendiyé dans un couvent autre que Bkerké et d'abolir la nouvelle congrégation.

Le 12 mars 1754, un Bref Pontifical recommandait au Patriarche de donner à Hendiyé de bons directeurs de conscience. Mais le cas de la religieuse avait suscite des remous non seulement au Liban, mais jusqu'en Syrie et notamment à Alep, sa ville natale.

On lui attribuait des guérisons et on demandait partout sa bénédiction. Quand elle sortait en public pour visiter ses couvents, la foule touchait ses vêtements et s'agenouillait pour recevoir sa bénédiction.

En 1766, Joseph Stephan fut élevé au Patriarcat maronite.

Cet événement inattendu aida Hendiyé à multiplier ses couvents et atteindre une certaine célébrité, car le nouveau Patriarche protégea Hendiyé et crut la comprendre mieux que son prédécesseur. Mais il ne tarda pas, par la suite, à hâter sa chute. De grossières erreurs témoignent de l'orgueil de Hendiyé, notamment ses prétentions d'avoir des révélations personnelles de Jésus-Christ, dévoilèrent son jeu et attirèrent la haine du grand public et du clergé. Deux clans se formèrent l'un pour elle, l'autre contre elle. Les gens du peuple sont convaincus que Hendiyé s'adonnait à la magie et que montée sur un bouc, elle allait, la nuit, aux Indes assister à de mystérieuses orgies. Une religieuse de la famille Khazen en quittant la congrégation, mit le public au courant de ce qui se passait à l'intérieur de Bkerké et révéla que les membres de la congrégation de Hendiyé employaient le poison pour se débarrasser de ceux qui les gênaient.

Une guerre ouverte fut alors déclarée contre Bkerké.

Parmi ceux qui se soulevèrent contre la ''Mère'' figurent les Franciscains de Harissa qui étaient au courant de tous les secrets de Bkerké, les Peres Jésuites, notamment le frère de Hendiyé, les Khazen, Saad-El-Khoury, ministre de l'Emir Youssef Chéhab, et plusieurs évêques.

En janvier 1775, Rome envoya au Liban le Franciscain Pierre Maretta, ancien supérieur du couvent de Harissa. Il eut un premier entretien avec le Patriarche qui voulut défendre Hendiyé, mais le Père Moretta muni de pleins pouvoirs par le Pape Pie VI pour liquider le cas Hendiyé, prit en main le dernier chapitre de la vie de Hendiyé.

Il ne lui fallut pas longtemps pour terminer l'enquête et prononcer son verdict contre cette femme et son œuvre.

Tout s'acheva le 17 juillet 1779, un Bref contenait les trois décrets émanant de la Sainte Congrégation de la Propagande:

Le premier déclarait Hendiyé coupable
Le second abolissait la congrégation du Sacré-Cœur
Le troisième exigeait la déposition du Patriarche Stephan

Que devinrent les membres de la communauté de Bkerké? Les uns entrèrent dans des couvents du Liban pour y faire pénitence. D'autres réintégrèrent leurs familles.

Quant à Hendiyé elle vécut jusqu'en 1798 expiant dans le mépris, la pauvreté et l'abandon, ses fautes.

Tous les couvents fermèrent leurs portes devant elle.

Ses derniers jours elle les passa dans un couvent de Notre Dame de Haklé, grâce à l'intervention du délégué apostolique et du vicaire patriarcal.

Elle mourut le 13 février 1789.
Fri Jul 25, 2014 8:43 am View user's profile Send private message Send e-mail Visit poster's website
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