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Littérature - Jadal Bizanti, Pub littéraire Liban Beirut |
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Littérature - Jadal Bizanti, le premier pub littéraire du Moyen-Orient (agenda culturel du 24 février au 9 mars 2010)
Le cercle des poètes n'a pas disparu. Son fier bastion de Manara ouvre chaque jeudi soir ses portes aux habitués, aux curieux et aux passants. Bref, à tous ceux qui répondent au dicton « Aujourd'hui, rien que la poésie, demain, on avisera ».
Eclairé comme un phare, l'étroit immeuble de pierre aux faux airs de Flat Iron Building est visible depuis le haut de l'avenue Caracas. Est-ce son nom intrigant, "Polémique byzantine", qui donne au pub l'allure d'un QG dissident? A l'intérieur, la musique traditionnelle chauffe la salle, dont les murs sont recouverts de peintures, de photos d'artistes et d'extraits de recueils de poésie. La soirée n'a pas commencé mais déjà les tables sont recouvertes de mezzés, que les participants picoreront avant le début de la lecture. Comme dans la maison familiale, on met les pieds sous la table en arrivant.
Afaf Nasser, la maitresse des lieux, orchestre les événements avec le poète Chabib Lamine: ce sont eux qui ont repris le concept de poésie délocalisée. Née à Beyrouth, au Regusto, l'idée de lire des vers dans les bars a d'abord connu de belles années "Chez André", dans Hamra, avant d'atterrir au Jadal Bizanti. Assise à une table en retrait, entourée du noyau dur des habitués, Afaf résume avec gaieté leur démarche: "La poésie, c'est un peu lourd. Avec un verre, c'est plus léger".
Irakiens, jordaniens, palestiniens, égyptiens, les poètes invités viennent de tout le Moyen-Orient, confirmant ainsi le caractère unique du Jadal Bizanti dans la région du Levant. A l'occasion de Beyrouth capitale mondiale du livre, ce sont 10 poètes libanais qui ont été sponsorisés par le ministère de la Culture. "On a un peu de tout ici, confirme Afaf Nasser, c'est comme un petit Liban". Pendant dix semaines, Mohammad Abdallah, Chawki Bazii, Abbas Baydoun et bien d'autres se sont succédés devant le micro du Jadal.
Dans les rangs, clairsemés ou serrés selon la notoriété du poète, les cheveux poivre et sel et les calvities sont majoritaires. Le début de la lecture ferait presque penser à une réunion d'anciens élèves, tant le ton n'est pas solennel et l'alcool consommé sans modération.
Au troisième poème, pourtant, l'atmosphère change. La voix de Mohammad Abdallah, grave et émouvante, sa lente diction et son allure de Sean Connery captent l'audience. On ne rit plus, on ne mange plus, on ne fait qu'écouter. Dans un arabe littéraire proche de la partition musicale, un Liban conceptuel surgit: sa nostalgie, l'odeur de ses fleurs, le sort de ses domestiques. Un Liban fait mots. Chaque verset est ponctué des douces rumeurs masculines de la salle, témoins sonores et rauques de l'admiration qu'ils portent au liseur.
Du néophyte à l'ami d'enfance, personne ne reste insensible au mariage de ce pays et de cette langue, dont tous, à en juger par la connivence triomphante dans la salle, sont amoureux.
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